"A Very Special Agent" (Terminée)

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Que le temps paraissait long...Sara avait disparu à l'intérieur du bungalow depuis plusieurs minutes et j'espérais qu'elle ne soit pas tombée dans un piège...
J'étais restée là où elle m'avait laissé, à quelques mètres, cachée à l'ombre du seul arbre des environs...Je bouillonnais intérieurement et brûlais de ne pas pouvoir défoncer cette porte, arme en main et voir ce que ce bungalow refusait de me livrer!!

Enfin, la porte se réouvrit et Sara sortit sur le palier. Scrutant dans ma direction, une main protégeant ses yeux de la lumière de midi, elle ne me voyait pas...
Je fis un pas de côté et me détachais de l'ombre de mon arbre...Pensait-elle que j'aurai put partir sans explication, sans réponse à toute cette aventure?

Enfin, elle me vit et son visage s'illumina, d'un geste de la main, elle me fit signe de la rejoindre...Lorsque je parvenais à la porte, Sara avait de nouveau disparu à l'intérieur du bungalow.

Timidement, je poussais la porte et entrais dans une pièce de bonne dimension. Après une exposition prolongée à la lumière du Nouveau Mexique, il me fallut quelques secondes pour habituer mon regard à l'obscurité...

Sara vint me prendre par le bras et m'introduit auprès de nos hôtes:

« Les garçons, je vous présente Amy...!! Amy m'a été très précieuse ces derniers jours, et tout comme vous, elle a été plus que touchée par toute cette machination... » Puis ce tournant vers moi:

« Amy, je te présente Sucre, Lincoln...et Michael!! »

Face à moi, trois des hommes les plus recherchés du Continent, et aucun des trois n'avait le visage d'un tueur...

Je vis d'abord Fernando Sucre.
Le portoricain était assis à cheval sur une chaise et ses bras reposaient nonchalamment sur le dossier. Le sourire en coin, le regard railleur, il ne m'avait pas quitté des yeux depuis mon entrée...Me fiant à mes instincts de psychologue, je devinais quelqu'un de charmeur et pas dénué d'un certain humour...Je fus gagnée par une vague de confiance...Je n'avais pas fait tout ce chemin en vain!

Balayant la pièce d'un regard circulaire, je tombais ensuite sur Lincoln Burrows...L'homme par qui tout était arrivé!
A la différence de Sucre qui respirait l'innocence et la force tranquille, Lincoln était un homme marqué à vie par les années qu'il avait passé en prison...Son arrestation et son incarcération remontaient à plus de trois ans...Et les conditions de sa détention n'avaient pas du être de tout repos!!! Je voyais un homme au visage tiré, soucieux et sur la défensive...
Si Sucre m'avait gratifié d'un sourire de bienvenu lorsque j'avais pénétré dans ce lieu, Lincoln n'avait même pas tourné la tête depuis mon arrivée. Il s'évertuait à ignorer la conversation qui se tenait dans le salon en sa présence...

Assis dans l'un des fauteuils qui trônait face à un petit téléviseur, il feuilletait un magazine et ne décrispait pas les lèvres...

Malgré les révélations et les certitudes de Sara concernant la complète innocence de Lincoln face aux actes qui lui étaient reprochés, je n'arrivais pas à envisager cet homme « blanc comme neige »...
Le psychiatre de la prison qui avait procédé à son évaluation lors de son arrivée à Fox River avait parlé de quelqu'un de renfermé, instable et solitaire...Son attitude ici confirmait l'analyse...Cependant il m'intriguait et j'espérais en savoir plus sur sa version du drame qui nous ébranlait tous...

Le fond de la pièce était baigné d'obscurité et je n'avais put qu'entrevoir le troisième homme...Aussi je restais subjugué par son aura lorsqu'il vint à ma rencontre et qu'il me sera la main:

« Sara m'a dit tout le bien qu'elle pensait de vous, et ce qui était arrivé à votre soeur...Je suis sincèrement désolé de tout cela. » me dit-il d'une voix profonde.

Michaël Scofield semblait sincèrement touché par mes malheurs. Cet homme était tel que je me l'était imaginé; mince, athlétique, de grands yeux bleus pétillants d'intelligence, doté d'une grande faculté d'empathie, il avait su sortir son frère de prison, et il s'apprêtait aujourd'hui à faire justice selon ses règles...

Alors que j'avais tant appréhendé cette rencontre, je commençais à me dire que j'étais finalement du « bon » côté et que tout ce que j'avais traversé touchait bientôt à sa fin!

C'est alors que je le vis...Il venait de surgir par une porte dissimulé dans un coin de la pièce. Se frottant les yeux et baillant, il ne réalisa pas immédiatement notre présence...et ce moment d'ensommeillement prolongé me permit de réagir la première!!
Je traversais la pièce et lui bondis à la gorge, mon arme au poing!! Je lui assénais un violent coup de crosse au visage, « un prêté pour un rendu »!!Mon coup atteint sa cible de plein fouet, je venait de lui faire éclater l'arcade sourcilière gauche...Et alors que le sang se répandait petit à petit sur son t-shirt, j'en profitais pour passer rapidement dans son dos et le bloquer définitivement dans ses mouvements, avec une clé de bras!!!
De toute ma carrière comme Agent Fédéral, je n'avais pas souvenir d'avoir un jour ceinturé un homme avec cette haine!! Je voulais sa mort, je réclamais justice et cette fois je ne flancherais pas!!

De la main droite je maintenais fermement Kellerman, son bras replié dans son dos, et de la main gauche je lui enfonçais le canon de mon arme dans la tempe:

« Si tu bouges, j'te jure que je n'hésiterai pas à presser la détente...Espèce de salaud, tu ne mérites pas mieux... » lui hurlais-je...

Je venais de prendre tout le monde de vitesse, sans doute grâce à mes réflexes de professionnelle, et personne n'avait bougé...Ma haine était sans pareil et je commençais à croire que j'étais tombé dans un guets-apens...
Mon regard se porta sur Michael et je le rendis immédiatement responsable de la situation:

« Comment pouvez-vous être à la solde d'un tel individu...Je vous croyais intègre...Je pensais que vous souhaitiez la justice!!! Cet homme a kidnappé ma sœur et le fils de mon collègue!Cet homme est assassin!! »

Sara, Michael et Sucre ne disaient rien, les yeux braqués sur la scène, ils étaient comme pétrifiés...Kellerman n'avait rien fait pour se défendre et n'avait même pas objecté à mes accusations!! Tout avait été très vite et je réalisais à quel point toute cette situation était incongrue...mais je refusais de me laisser avoir encore une fois!!

« Lâchez-le! Vous ne vous ferez pas justice seule...et nous avons encore besoin de lui!!! » Lincoln avait posé le magazine qui l'occupait, et doucement s'était levé pour s'approcher de nous!

« Donnez-moi votre arme, vous risquez de nous blesser tous...Je lui aurait moi-même tiré cette balle dans la tête depuis longtemps si les choses étaient différentes...Mais ce n'est pas possible et vous le savez aussi bien que moi...Maintenant, laissez-le, venez vous assoir, je crois qu'il est temps qu'on vous livre quelques secrets!! »

Ses paroles étaient réconfortantes et il faisait preuve de beaucoup de sang froid, malgré ce qui lui était arrivé. Ainsi, alors que j'aurais tué Kellerman sans réfléchir, le frère de Michael m'offrait enfin des réponses et je l'espérais des solutions! Je n'aurais écouté personne d'autre que lui, dans un moment pareil...Il avait subie encore bien plus que je ne pouvais l'imaginer!!

Doucement, je relâchais le bras de Kellerman, sans oublier de lui tordre vigoureusement le poignet en prime!!! Et posais mon arme sur la table!!!

Sara s'empara d'un torchon, qu'elle humecta dans l'évier et vint l'appliquer sur l'arcade de Kellerman, qui n'avait cessé de saigner...:

« Sucre, peux-tu fouiller dans le petit sac que tu vois là-bas, contre la porte, tu y trouveras une trousse de premier secours...Ramène-la moi, s'il te plaît! Et vous tenter de vous tenir tranquille ou je me charge de vous, une bonne fois pour toute, c'est compris!!! » Sara comme toujours faisait preuve d'une grande autorité naturelle, et Kellerman ne broncha pas...

Après m'être rafraîchie, je vins m'assoir autour de la table, Michael et Lincoln y prirent place aussi:

« Après notre évasion de Fox River, nous nous sommes rapidement séparés pour ne pas attirer l'attention...C-Note et Abruzzi sont partis rejoindre leur famille, Haywire et Tweener ont pris la route...quand à T-Bag il avait des comptes à régler avec moi...Il nous a fallut être plus que persuasifs pour nous en débarrasser!!!

- T-Bag est mort, tué d'une balle dans la tête par cet homme...Au moins aura t-il œuvré une fois pour le bien!!! dis-je à Michael pour compléter son histoire. Kellerman ne cilla même pas!

- Je ne savais pas! » Répondit-il simplement...mais son regard ainsi que celui de Sucre et Lincoln en disait suffisamment long...

- Nous avons dût faire un détour par l'Utah avant de nous rendre ici, et malheureusement nous sommes tombé sur un déploiement important de fédéraux...Tout portait à croire que vos collègues - oui, Sara m'a dit que vous étiez l'une des leurs - avaient mis la main sur l'un des fugitifs! T-Bag sans aucun doute...tout s'explique maintenant!! »

Je le vis faire un sourire à Sucre et jeter un coup d'œil près de la porte d'entrée. Un gros sac à dos fermé par un cadenas trônait contre le mur...Je me demandais un instant ce qu'il pouvait contenir, mais n'eus pas le temps d'y réfléchir plus longtemps, car Michael reprit son histoire...:

« Nous avons été à deux doigts de nous faire prendre, et alors que les fédéraux se rapprochaient dangereusement de nous, nous avons bénéficié d'une aide impromptue!!! Paul, racontez-leur la suite!!! »

Alors que Sara terminait de suturer sa plaie et lui bandait la tête afin de maintenir la compresse en place, Kellerman entama son propre récit...:

« Je suis un soldat, entraîné pour servir, fidèle jusqu'à la mort...Après avoir fait mes classes à Annapolis, j'ai décidé de me spécialiser dans les Forces spéciales et...

- Abrégez Kellerman, votre vie nous importe peu, venez-en à l'essentiel » lui dit Lincoln.

Kellerman reprit:

« Bref, je suis rapidement entré en politique mais dans l'ombre des plus grands...Leur servant de soutien, d'homme de terrain, ou parfois plus!!! Et puis la vie m'a remis sur le chemin de Caroline Reynolds, elle était sénatrice à l'époque et son mandat nécessitait une personne de confiance pour assurer sa sécurité...Je connaissais Caroline, nous avions été dans le même collège, et nous fréquentions il y a longtemps le même cercle de personnes... »

Tout comme Lincoln, la vie de Kellerman était la dernière de mes préoccupations et j'étais à deux doigts de lui rappeler à mon tour qu'il devait nous éclairer sur notre affaire en cours, pas nous retracer sa biographie...Quand il aborda son travail auprès de la Présidente Reynolds...Je me mis alors à redouter ce qui allait suivre:

« Naturellement j'ai été muté dans son service de gardes du corps...Mais mes compétences méritaient bien plus et j'ai été promu garde rapprochée très rapidement, puis chef de toute sa sécurité...Les liens qui nous unissaient étaient forts, j'occupais une place de choix dans sa vie et bénéficiais de toute sa confiance... »

Ses yeux brillaient d'une lueur particulière, et un instant je crue voir l'Agent O'Brady, l'homme séduisant et sympathique que j'avais un jour rencontré durant mon unique nuit d'espionnage...Mais O'Brady n'avait jamais existé et les excès de nostalgie de Kellerman me perturbaient au plus haut point, car je commençais enfin à comprendre où il voulait en venir...:

« ...j'ai été plus que persuasif avec ses détracteurs pour l'aider à construire le personnage politique qu'elle est devenue...Son mandat en tant que Présidente des Etats-Unis n'a rien d'un hasard, ni même l'histoire qui vous -enfin, qui nous- occupe!! »

Kellerman se tut et jouit un instant de la portée de ses paroles sur son auditoire.
Mais rapidement, Lincoln lui rappela pourquoi il était là et qui était le patron dans cette pièce:

« Kellerman, ne vous faites pas prier plus longtemps et finissez-en avec votre pathétique petite histoire, que Sara et Amy puissent enfin assembler les pièces de tout ce puzzle!!!

- C'est bon, je poursuis...Lorsque Caroline s'est mise à viser la Présidence, elle s'est penchée sur les éléments qui pourraient la discréditer, et bien sûr le principal souci de sa campagne était son frère Terrence Steadman...

- Bon sang!! Reynolds l'a fait taire!!!

Ma stupéfaction était telle que je venais de dire tout haut ce que je pensais tout bas! Michael qui connaissait déjà l'histoire observait nos réactions avec attention, et me fit un signe d'approbation...:

« Pas exactement à vrai dire...Elle l'a fait disparaître pour être tout à fait précis!!! dit Kellerman.

- Quoi?!! Comment ça, fait disparaître? Lincoln a été accusé de son meurtre, mais si je vous suis bien, Steadman n'a pas été tué par Lincoln...sans doute est-il mort de votre main ou de celle de l'un de vos hommes...Je me trompe!! lui répondis-je du tac au tac..

- En fait Steadman est toujours vivant...finit Kellerman

Cette révélation eu l'effet d'une bombe pour moi et pour Sara...Plus Kellerman comblait nos blancs, plus Sara devenait livide...Je crus même qu'elle allait défaillir à l'annonce du faux meurtre de Steadman!! Michael posa délicatement sa main sur son bras pour la réconforter...:

« Si vous croyez que je vais m'en tenir à ça Kellerman c'est que vous n'avez pas assez enquêté sur moi...Finissez votre histoire et n'omettez plus de détails!! »

Même s'il détenait les secrets, cela ne faisait pas de lui le « Maître du Jeu », en tout cas, il ne l'était plus depuis qu'il était passé de notre côté et je me chargerais de le lui rappeler à chaque fois que je le verrais se disperser!

« Steadman bloquait les plans de Caroline par rapport à ses positions politiques extrêmes clairement affichées. Les tabloïds décrivaient régulièrement à quel point elle était incapable de rallier les opinions, puisqu'elle ne pouvait même pas s'y atteler dans sa propre famille!! Ainsi, lorsque son frère a eu besoin d'elle, alors qu'il connaissait de graves problèmes avec des créanciers multiples, la solution s'est imposée d'elle-même!!

- La solution s'est imposée d'elle-même, on croit rêver!!! Vous êtes un malade Kellerman, et « votre » Présidente aussi...J'espère être là pour la voir tomber, le jour où toute cette mascarade sera révélée au monde!!

- Quoi qu'il en soit, nous avons fait « disparaître » Steadman et mis le meurtre sur le dos de Lincoln Burrows...

- Voilà qui était bien commode...mais je ne vois pas le rapport avec Lincoln?? Pourquoi lui?

- L'ordre qui m'a été donné à l'époque était de « coincer » un type qui était criblé de dettes et qui avait été en contact avec Steadman...Burrows a travaillé pour sa boîte en intérim...Et il avait un sacré pactole à rembourser à un dénommé Simmons...Tu te souviens de lui, hein Burrows!!! »

Kellerman souriait à cette évocation comme s'il s'agissait de quelque chose de plaisant...Lincoln n'avait pas cillé! Michael bondit de sa chaise et asséna un violent coup de poing à Kellerman... Celui-ci tenta de lui rendre la réciproque, mais chancela sous le poids des coups reçus en peu de temps...Sucre se jeta entre eux pour les arrêter:

« "Papi" je sais que tu veux défendre ton frère, mais tu n'y arriveras pas en cassant la gueule de notre seul témoin fiable!!Et toi "Cabrón" si tu continues à chercher mon pote c'est moi qui vais te défigurer, "con mi puño" et tu vas t'en souvenir..."Entiendes"!! »

Comme il était un peu plus grand que Kellerman, celui-ci renonça et se rassit pour terminer son histoire. Le nez douloureux il se frottait pour faire passer le coup reçu, mais reprit son récit:

« Le type mort dans la voiture n'était pas Steadman, mais un clochard ramassé dans la rue, et lorsque les avocats de Burrows ont tenté de prouver son innocence et qu'il a fallut effectuer des tests sur le corps de la victime, nous avons fait en sorte que le mort ait les caractéristiques du frère de la Présidente...! Sans preuve pour étayer sa parole, Burrows a été condamné, Caroline rétablie dans les médias grâce à ce deuil providentiel et elle a su mené sa campagne présidentielle d'une main de maître!! »

Kellerman avait l'air tout à coup beaucoup plus amère face à la réussite de sa protégée:

« Pourquoi vous êtes-vous retourné contre elle si vous aviez participé au processus de son ascension et que vous teniez tant à elle...Je ne comprend pas!! » lui dis-je dubitative.

- Disons que j'ai mes raisons et que je ne fais plus partie dorénavant de son cercle très fermé...Je sais où est retenue Steadman...car il n'est pas libre de ses mouvements, et je vous fournirais les éléments nécessaires pour obtenir la grâce de Burrows, ainsi que celle des autres fugitifs...

- Et ma soeur, et le fils de Mahone??? Rendez-les moi, ils ne vous serviront plus de monnaie d'échange maintenant que vous êtes dans le « bon camps »!!!!

- Les deux prisonniers sont ma garantie pour rester en vie jusqu'au dénouement de cette histoire...Quand tout cela sera terminé, que Steadman et Caroline auront été confondus, je partirai pour un pays lointain, et je vous rendrais vos proches...Je les ai caché dans un endroit sûr, ils vont bien et ne risquent rien!!!

Comment le croire, les réactions de cet homme étaient totalement inattendues et malgré sa volonté de « se » faire justice pour des raisons obscures, je n'arrivais pas à lui faire confiance...Mais j'allais y être obligée si je voulais revoir Beth et Cameron!!

Sara n'avait rien dit depuis plus d'une heure, elle semblait n'être plus que l'ombre d'elle-même. Soudain, elle prit une profonde respiration et s'adressa à tous:

« C'est elle la responsable des chamboulements dans nos vies, Caroline Reynolds, elle doit payer pour ce qu'elle a fait...Il nous faut un plan, et vite...Nous devons la confronter pour ses actes!!! »

Tous les yeux s'étaient retournés vers Sara, et chacun acquiesça à sa proposition...Maintenant que nous avions enfin des éléments à charge, nous pouvions jouer à « armes égales »...La partie qui s'engageait allait être délicate à mener!!

Les révélations de Kellerman nous avait laissé comme un arrière goût amère et autour de la table tout le monde s'était tu. Chacun était cloîtré dans ses propres ténèbres, et il allait de soi qu'il nous faudrait encore mettre beaucoup en jeu pour nous en sortir...

Sara avait raison, nous devions faire tomber Caroline Reynolds pour ses malversations, ainsi que son frère pour avoir disparu et fait accuser un innocent de son pseudo meurtre!! Si les objectifs étaient parfaitement clairs, les moyens pour y parvenir l'étaient beaucoup moins et à part faire monter Kellerman en première ligne pour l'opposer à son ancienne patronne, je ne voyais pas ce que nous pouvions faire...

Sucre fut le premier à rompre le silence pesant. Gigotant sur sa chaise, il ne tenait visiblement plus en place et nous fît une remarque bien judicieuse:

« "Amigos" si vous voulez coincer la femme la plus en vue des Etats Unis, il va falloir vous lever tôt ou avoir un bon plan! Parce qu'avec des bonshommes comme celui-là autour d'elle, ça risque d'être très compliqué pour l'approcher... »

Se levant d'un bond il commença par s'étirer paresseusement puis se dirigea vers l'évier pour se passer la tête sous l'eau:

« Je vous jure, je crève ici, ça fait des jours qu'on est pas sortie de cette pièce, allez, remuez-vous, il est temps de passer à l'action!!! »

Michael regardait son ex co-détenu avec amusement...Ces deux-là étaient bien plus que de simples compagnons de galère! Sucre était encore auprès des deux frères après toutes ces aventures, et il n'avait visiblement pas cherché à rejoindre sa famille. J'étais prête à parier que le choix du portoricain n'était pas mue par un sentiment de culpabilité ou parce qu'il se sentait redevable envers Michael...Il restait parce qu'il tenait sincèrement aux deux frères et qu'il avait sans doute encore à leur apporter!!

« Sucre a raison, il est temps que nous passions au plan B!!! dit Michael

- Comment, tu as un plan B et tu ne m'en as même pas parlé, "tio" qu'est-ce que tu vas nous inventer cette fois-ci???

Sucre trépignait comme un enfant, gesticulant et sautillant dans le bungalow, il commençait à me donner le tournis!!!

- Le plan B est une façon de parler Fernando, maintenant que nous sommes au complet, je vois une alternative...Paul a parlé d'une visite de La Présidente Reynolds au Nouveau Mexique, en comité réduit...

- Ah bon, il a parlé de ça? Quand??

- Hier lorsque tu regardais ta Telenovela sur le Canal de Las Estrellas, tu étais tellement absorbé par ton programme que nous aurions aussi bien pût te laisser là seul que tu ne t'en serais même pas rendu compte!!!

Sucre haussa les épaules un peu penaud et soupira comme une âme en peine. Sa réaction naïve créa immédiatement l'hilarité générale autour de la table...Qu'il était bon de rire un peu pour relâcher toute la pression accumulée!!!
Cependant, nos fous rire furent de courte durée et Lincoln recentra rapidement le débat:

« Si nous allons à sa rencontre sur ce meeting, nous aurons à faire à son service de gorilles rapproché, ainsi qu'aux médias qui couvriront l'évènement...Nous jeter directement dans la gueule du loup en voilà une bonne idée!!! »

La situation était loin de le faire sourire et la justesse de sa conclusion stoppa net toutes nos perspectives concernant ce projet insensé...:

« En fait, cette visite ne devrait pas être relayé par les médias...enfin, pas immédiatement. Carolyn souhaite se rendre à Pueblo de Acoma, une petite réserve indienne plus au Nord de Gila. Elle doit y rencontrer l'un des derniers chefs Anasazi encore vivant et s'attirer la sympathie de cette minorité ethnique...C'est pourquoi, si les médias se déplacent avec elle, elle n'obtiendra pas ce qu'elle désire, et les Indiens de la réserve se refuseront à la recevoir...Oh les médias seront vite avertis de cette petite escapade...mais plus tard, quand tout cela n'aura plus de conséquences...!! Comme toujours, elle aura été bien conseillée!! »

Kellerman venait de nous redonner l'espoir...Cette visite si près de nous était une aubaine, nous devions saisir cette opportunité et ne pas la rater...Maintenant restait à savoir comment nous nous organiserions, et qui serait du voyage!

« Ce n'est pas que je doute de vos sources Kellerman, mais je préférerais vérifier par moi-même que vous ne nous entraînez pas dans un piège... »

Lincoln attrapa la télécommande du petit poste TV qui trônait dans un coin et l'alluma, à la recherche d'une chaîne relatant la future visite de Carolyn Reynolds à Pueblo de Acoma, au Nouveau Mexique...
L'hôtel était équipé des chaînes nationales généralistes, mais aussi d'un réseau de chaînes d'informations spécialisées. Pianotant sur le boîtier, Lincoln passait d'une chaîne à l'autre, sans trouver une quelconque allusion à un voyage de la Présidente...
L'information sur laquelle il tomba fut comme un coup de massue pour le groupe...:

« ...célèbre avant même son incarcération, il faisait déjà les gros titres des médias concernant différentes affaires de détournements de fonds, de blanchiment d'argent ou de disparitions de témoins à charge!
Rien n'aurait put l'arrêter, mais l'un de ses anciens acolytes s'est retiré du business, non sans révéler quelques secrets juteux sur son ancien patron, et la garantie de faire dorénavant partie du programme de protection des témoins...Ses révélations ont conduit le chef de l'organisation à une peine de 5 ans d'emprisonnement à la Prison de Fox River...
Notre témoin infortuné est aujourd'hui exilé et caché sous une nouvelle identité, mais il a put être joint par l'une de nos journalistes, à qui il a confié ses premières impression concernant cette nouvelle:

« Je ne tire aucun enseignement de ma vie passée aux côtés de John Abruzzi, et je suis navré d'apprendre sa disparition, mais les circonstances ne m'étonnent pas le moins du monde...Il est partie tel qu'il a vécu! »

Voilà un épitaphe fidèle à écrire sur sa tombe....Pour les téléspectateurs arrivés en cours de journal, je rappelle la principale information du jour: L'ancien chef mafieux John Abruzzi a été retrouvé mort non loin de sa propriété de Palm Bay en Floride, les voisins ont parlé d'un règlement de compte , mais aucun coup de feu ne semblent avoir été tiré sur place...L'enquête est en cours, mais les autorités se réjouissent de cet événement inattendu, qui raccourci la liste des fugitifs de Fox River à trois hommes encore en cavale...Lincoln Burrows, Michael Scofield le cerveau de l'évasion et Fernando Sucre. Si vous apercevez l'un de ses hommes ou que vous détenez des informations, merci de contacter le numéro de cette ligne d'urgence qui s'affiche en ce moment sur votre écran...Ces hommes sont armés et dangereux! »

Lincoln coupa la télévision et jeta la télécommande d'un geste rageur...

« Comme ça tu es le cerveau de l'évasion, "papi"...Et nous alors, on s'est pas tournés les pouces quand même, mais qu'est-ce qu'ils croient!!! »

Sucre arborait un air faussement insulté...Cet homme avait l'art de dédramatiser toutes les situations. Son humour n'était pas toujours très à propos, mais il le distillait avec tant de naïveté qu'il obtenait gain de cause à chaque fois.
« Tu crois vraiment que je me prend pour le cerveau dans cette histoire...Je me passerai bien de cette publicité à vrai dire!!!! Quand je pense que je l'ai fait sortir dans l'espoir qu'il se rachète de ses fautes passées et qu'il trouve sa rédemption...Quel gâchis!! »

Michael avait l'air sincèrement ébranlé par la nouvelle que nous venions d'apprendre.

« C'est elle qui a tout orchestré!! Vous ne comprenez toujours pas? Je suis sûre que c'est un coup "des hommes en noir"...enfin, de ses collègues!! Kellerman dites-leur!! J'ai raison non?! »

Les pièces s'imbriquaient dans mon esprit et je comprenais que nous venions de franchir un point de non retour...Toutes les personnes impliquées dans cette affaire devaient disparaître...Fugitifs, Agent du FBI, médecin de Fox River...ou ancien responsable de la sécurité de la Présidente....

« Amy a raison, Carolyn a engagé les meilleurs à ses côtés et leur premier commandement est de liquider tout ceux qui ont été en contact avec Burrows...Il ne doit rester aucun survivant...Cela pourrait nuire à sa carrière! S'il avait été exécuté, personne n'aurait découvert la supercherie...mais il a fallut que son frère s'en mêle! Scofield vous êtes responsable de la déchéance de toutes les personnes qui vous entourent, leur mort est la conséquence de votre folie...La condamnation d'un homme contre de nombreuses vies!!! »

Kellerman jubilait de reporter toutes les fautes du monde sur un seul homme...Michael quand à lui, venait de tomber la tête entre ses deux mains, son corps était secoué de sanglots...L'atmosphère du bungalow était saturée, la promiscuité et les dernières révélations avaient eu raison de nous tous:

« Vous êtes un salaud Kellerman, Michael n'a jamais obligé qui que soit à l'accompagner dans son périple...Il a voulu sauver son frère, et il a réussi...Les autres prisonniers ont fait le choix de le suivre, ils ont choisis de reprendre leur liberté quelque soit le prix à payer...J'ai fait le choix de le laisser sortir de Fox River...Cette nuit-là, j'ai volontairement laissé la porte de l'infirmerie ouverte...Je savais qu'il y aurait des conséquences, aujourd'hui je n'acculerais jamais Michael pour ce qui s'est passé...Et je vous conseille d'en faire autant...Chacun a fait ce qu'il avait à faire...La seule responsable de tout cela est Caroline Reynolds et nous allons aller la débusquer à Pueblo de Acoma...Pas question que je reste ici à attendre...Je pars avec vous!!! »

Sara était rouge de colère, mais elle avait encore fait preuve de sang froid pour ne pas se ruer sur Kellerman et le gifler...Son air impertinent commençait à me taper sur les nefs et il nous faudrait bientôt trouver une solution pour nous débarrasser de lui...
En attendant, Sara avait raison, dans le fond les événements s'étaient tous enchaînés les uns aux autres, mais une seule personne était responsable, il ne fallait pas se tromper de cible...

Sara s'était approchée de Michael et s'était mise à lui frotter le dos doucement. Celui-ci releva la tête, essuya ses yeux d'un revers de manche et repris contenance:

« Je n'aurais de cesse de réparer mes erreurs, cette histoire a été bien trop loin... Kellerman a raison, je suis responsable du destin des personnes qui ont pris le parti de me suivre...Je traquerai sans relâche les coupables de toute cette machination et je commencerai d'abord par "couper la tête de la Gorgone" quoi qu'il m'en coûte!!»

♦♦♦♦♦♦

Il fut décidé, d'un commun accord que le groupe se séparerait en deux afin de ne pas trop attirer l'attention. Cette séparation temporaire n'avait rien de réjouissant pour nous, mais cette solution paraissait plus commode à adopter.

Sara qui souhaitait prendre part à l'aventure se proposa finalement pour garder le bungalow et recueillir les blessés si notre confrontation tournait « au vinaigre »...
Les deux frères étaient décidés à en découdre avec la Présidente Reynolds, aussi leur participation à l'escapade ne souffrit d'aucun commentaire...

Puis, vint le cas de Kellerman à débattre. Celui-ci était partisan de monter « au front » selon son expression, et il valorisa son rôle essentiel dans l'affaire qui nous occupait...Mais personne n'était dupe quand à ses véritables raisons de vouloir rendre visite à son « amie » Caroline!!!
C'est pourquoi, après de longues discussions, le plan fut établie de la sorte: Kellerman resterait à Gila, sous la surveillance de Sucre et de Sara...

Le portoricain ne partageait pas l'avis des deux frères et se sentait lésé par cette injustice:

« Comme toujours vous partez vous amusez sans moi...Pas question que je serve de "niñera" à ce type!!

- Sucre, je ne te demande pas de baby-sitter Kellerman, mais plutôt de rester avec Sara...
(A voix basse) Tu sais que je m'inquiète pour elle, et quand tu sais ce que ce salaud à déjà fait subir à Amy, je ne voudrais pas qu'il lui arrive la même chose! Je ne confierais Sara à personne d'autre, j'ai confiance en toi, mon frère!!!
(De nouveau à voix haute) Et puis nous n'en avons pas encore terminé avec Reynolds, cette fois nous allons juste lui faire une petite visite de courtoisie, la prochaine fois tu seras des nôtres, je te le promet!! »

Michael savait être persuasif quand il le fallait. Il connaissais parfaitement son ami et comment le toucher...Un immense sourire apparut enfin sur le visage de Sucre:

« Toi "papi" tu sais toujours comment me parler!!! Heureusement que je suis là pour prendre soin de « tes affaires »!! »

D'un air entendu, Sucre mit un coup de coude dans les côtes de Michael...Celui-ci rougit instantanément puis changea rapidement de conversation:

«Amy, il te reste à décider le rôle que tu souhaites jouer dans notre équipe...Comme nous laissons Kellerman ici, il me semble important que tu te joignes à Linc et à moi pour aller à Pueblo de Acoma. Tu es une logisticienne et tout comme Paul tu as, j'en suis sûr, une parfaite maîtrise des terrains inconnus et de leurs pièges...Tes connaissances nous seront très précieuses!!

- Mes compétences professionnelles ne valent sans doute plus dans de telles circonstances, mais je tenterai de me rendre utile...J'ai comme vous beaucoup à perdre, et je pense qu'un petit tête-à-tête avec l'investigatrice de toute cette machination ne peut m'être que très salutaire...Je pars avec vous! »

Ma décision était irrévocable et je savais que mes réponses étaient au bout de cette confrontation!!

Avant de partir, Michael fouilla dans le sac à dos qui trônait près de la porte et je le vis en ressortir une grosse liasse de billets...Il avait été incarcéré pour le braquage d'une banque, et son arrestation avait eu lieu dans l'enceinte-même de l'établissement, il ne pouvait donc pas avoir de butin caché...D'où provenait donc tout cet argent??

Soudain tout s'illumina...Michael était décidément bien surprenant!! Les fugitifs étaient enfermés à Fox River avec Charles Westmorland...Le fameux « DB Cooper »...Et un peu plus tôt il avait parlé de s'être rendu dans l'Utah avant de fuir face à mes collègues du FBI...Je devais en avoir le coeur net...
Aussi, j'attendis d'avoir quitter le bungalow et d'être installé à l'arrière du véhicule de Michael pour satisfaire ma curiosité:

« Vous avez mis la main sur le butin de DB Cooper, n'est-ce pas?? Le sac à dos cadenacé près de la porte renferme le pactole!!! »

Michael me regardait grâce au rétroviseur et me sourit:

« Heureusement que notre détour par l'Utah a été fructueux, car nous y avons risqué notre peau avec tous vos collègues en faction!! Charles nous a offert les moyens de retrouver sa planque contre un petit service...Ainsi, après avoir récupéré la carte du cadastre à Taylorsville, nous avons rusé pour mettre la main sur les « fameux » 2 millions de dollars...Charles souhaitait qu'une personne chère à son coeur est aussi sa part du butin...Nous la lui avons remis, le reste nous servira sans doute pour parvenir à nos fins!!!

- Je n'en reviens pas, vous avez doublé T-Bag pour la carte...Il n'avait donc plus aucune chance de trouver l'argent...Bon sang, il aurait put me tuer...Il m'a kidnappé, mais ne m'a pas tué...!!! »

Je réalisais à quelle point la situation était étrange...T-Bag aurait du me tuer, je ne lui avais servis à rien...Et Kellerman qui devait me faire disparaître, m'avait tout bonnement sauvé la vie!!! Quelle étrange mission!!!

« Tu es bien en vie, et je compatis aux épreuves que tu as dut traverser...Mais il faut que tu restes concentrée car nous allons avoir besoin de toutes nos facultés pour affronter la première Dame!! »

Lincoln était retombé dans son mutisme habituel, mais je supposais qu'il lui fallait se recentrer avant d'affronter les épreuves à venir...

Gila était à moins d'une heure de Pueblo de Acoma, mais le voyage s'annonçait long et pénible. Il fallait quitter la nationale pour rejoindre l'unique accès qui menait à la vieille cité. Cette route désertique, coincée entre deux canyons donnait un sentiment d'oppression, d'étranglement...Nous rendre dans ce village était bel et bien comme se jeter dans « la gueule du loup », à présent nous en étions parfaitement conscients...Cependant, il n'était pas question de reculer, nous étions si près du but....
Michael roulait lentement et cherchait visiblement un lieu sûr où parquer notre véhicule...Un rocher ou un cactus géant ferait l'affaire...Kellerman nous avait fait savoir que la Présidente ne devrait arriver qu'à la tombée de la nuit, car elle rentrait d'une série de visites officielles dans l'Ouest des Etats-Unis.

Il n'était pas plus de 17h et le soleil était encore haut dans le ciel quand nous aperçûmes enfin les premières maisons de Acoma...Après avoir garé la voiture dans un recoin rocailleux, nous firent le chemin restant à pieds...

Je redoutais l'entrée dans la petite cité, car nous ne passerions pas inaperçus dans cette région reculée du monde...Kellerman nous avait expliqué que ce village était l'une des dernières réserves d'indiens Anasazi d'Amérique, et que les hommes y vivaient en total autarcie. Le lieu était coupé du monde, appauvrie en ressources extérieures et je me demandais même si la presse ou la télévision avait réussie à atteindre cette part de la civilisation...

Comme nous nous étions aventurés dans les aspérités rocheuses pour y camoufler notre véhicule, nous prîmes le village à revers pour y pénétrer...
Au vue de l'agitation ambiante, il était à parier que la Présidente serait reçue sur la place principale du village, puis selon les dire de Kellerman, celle-ci ferait son discours de « réconciliation » dans l'ancienne mission installée par les moines franciscains en 1629.
L'église San Esteban était l'une des plus anciennes de tous les Etats-Unis et se dressait majestueusement au milieu d'un lotissement de petites baraques en adobe.
Tout comme des siècles avant eux, les habitants de Acoma avaient bâtis leurs maisons à partir de matériaux simples. Leurs constructions se composaient de briques de terre crue, séchées au soleil. Façonnées à partir d'un mélange savant d'eau, d'argile et de paille hachée, ces briques résistaient à toutes les intempéries, laissaient passer l'air, tout en étant un parfait isolant!
Si cette communauté vivait en parfaite autarcie, elle n'en était pas pour autant dénuée d'ingéniosité pour survivre dans ce désert appelé « Enchanted Mesa »...

Alors que nous atteignions le village, Lincoln nous fit signe de le suivre sans nous faire voir et pénétra le premier dans une sorte de grange qui semblait avoir été laissée à l'abandon...
Plongés dans le noir, nous avancions prudemment et avec l'angoisse de nous faire repérer...Le sol était jonché de boue séchée et de poussière et chacun de nos pas soulevait un peu de ce mélange nauséabond...
Les bras devant moi comme le ferait un aveugle, je tâtonnais dans l'obscurité pour ne pas rencontrer un obstacle, alors que je me dirigeais vers le fond de la grange je rencontrais le bras noueux de Lincoln qui s'était arrêté aux aguets:

« (A voix basse) Nous allons devoir rester cachés ici jusqu'à la nuit, c'est plus prudent...Nous aviserons lorsque Reynolds sera dans l'enceinte du village... »

Il avait chuchoté si bas qu'il était à peine audible.
La grange semblait être munie d'une sorte de box, je me heurtais à la porte dégondée et je trébuchais sur le sol qui venait de changer sous mes pieds...Je m'affalais dans une posture peu élégante et me retrouvais allongée dans les grandes bottes de foin qui recouvraient la seconde partie de la grange...L'obscurité du lieu m'évita le ridicule de la situation!!
Michael qui m'avait suivie de près s'inquiéta de ne soudain plus me sentir à son côté:

« Amy, ça va?? Tu t'es fait mal?? Mais où es-tu??

- Je suis là Michael, je viens de trouver la planque idéale et confortable pour passer les quelques prochaines heures, avance un peu plus à gauche, voilà, tu peux t'asseoir, ce foin a été fraîchement coupé... »

Les deux hommes vinrent s'asseoir. Nous restâmes ainsi, cachés, attentifs à l'animation qui régnait à l'extérieur et s'intensifiait d'heure en heure...

Lincoln était couché dans le fond du box et surveillait l'extérieur grâce au défaut des jointures entre les planches qui constituaient la base de la grange...Des interstices suffisamment larges pour y glisser un coup d'oeil, mais bien trop minces pour être vus de l'extérieur! Une bonne planque, vraiment!!!

Quelques heures passèrent, le soleil était maintenant très bas sur l'horizon et la lune commençait à briller. Lincoln qui n'avait pas quitté son poste d'observation, s'agita:

« La voilà!!! Bon sang, son service d'ordre est plutôt réduit, son véhicule vient de se garer sur la place du village... »

Nous nous approchâmes de Lincoln, afin d'assister au spectacle avec lui:

« Regardez, elle descend...Son chauffeur, sa voiture de tête compte trois hommes, et elle semble accompagnée de cette femme qui ne la quitte pas, cela nous fait cinq personnes à neutraliser!!

- Linc, tu n'as pas compté les hommes du village, et je n'aimerais pas avoir à me confronter à tout les habitants en plus du service d'ordre...Nous devons être discrets, et aller la rencontrer quand elle sera isolée...! »

Michael avait raison, il ne servait à rien de se faire remarquer, notre but étant de l'ébranler, pas de créer un scandale et de nous voir pourchassés après coup!!!

La meilleure solution était encore de patienter.
Après avoir entendu les brides de son « discours de réconciliation » teinté d'une pointe de patriotisme, la Présidente avait reçu une large salve d'applaudissements...La petite église San Esteban brillait de milles feux dans la nuit étoilé et la soirée était particulièrement chaude et moite...

Enfin, les Anasazis sortirent tour à tour de la mission, ainsi que les trois hommes de la Présidente, son chauffeur n'avait pas bougé de la limousine...Les hommes avaient allumés un grand feu de camps sur la place du village et les femmes s'activaient autour d'un grand banquet traditionnel...

Il était l'heure, une opportunité s'offrait enfin à nous...Nous nous extirpâmes de la grange avec prudence et nous longeâmes les bâtiments mitoyens pour rester camouflés...Soudain, une petite fille surgit face à nous en sortant par l'arrière de l'une des petites maisons...Surprise par cette étrange rencontre, elle resta un instant béate...Mais elle se repris bien vite et se mit à parler très rapidement dans un dialecte qu'aucun de nous ne compris...Elle allait nous faire repérer c'était plus qu'évident!!!

Michael s'avança doucement vers elle, s'agenouilla à sa hauteur et sortie quelque chose de sa poche...Il lui tendit une petite bille agate qui brillait sous les lueurs des flammes du grand feu...L'enfant s'en saisit d'un geste vif puis resta immobile, ses yeux fixés sur ceux de Michael! Celui-ci se releva, mit un doigt sur sa bouche pour imposer le silence à l'enfant et nous fit signe de le dépasser rapidement pour atteindre la porte du petit presbytère qui était à notre gauche.

Avec Lincoln, nous nous engouffrâmes dans la sacristie, Michael ne tarda pas à nous rejoindre...La Présidente était alors à quelques mètres de nous.
Lincoln sortit une arme de sa poche, me fit signe de rester en retrait pour assurer notre sécurité à tous les trois...Je sortis l'arme que j'avais récupéré depuis notre aventure en forêt avec Sara...ce n'était pas la mienne et j'avais peu de plaisir à manier l'arme d'un autre, mais elle m'était tout de même très utile à ce moment!!

Michael semblait hésiter...Partagé entre l'envie d'accompagner son frère pour rencontrer enfin la Présidente et la sagesse de rester en arrière pour faire le guet, il semblait en proie à une vraie bataille intérieure...Finalement, il me gratifia d'une petite tape sur l'avant bras qui me prouva sa confiance et s'avança derrière son frère qui venait de pénétrer comme un seul homme dans le choeur de l'église.

J'étais restée cachée dans la sacristie, mais je pouvais juger de l'acte qui venait de s'engager dans l'église...La Présidente était penchée sur l'autel et remettait de l'ordre dans ses papiers personnels. A ses côtés, la jeune femme qui ne l'avait pas quitté, arrangeait ses cheveux d'une main experte et laquait sa coiffure avec un geste circulaire...Les deux femmes étaient trop occupées pour se rendre compte que Lincoln et Michael venaient de les rejoindre. Cela facilita la suite des événements.
Michael se saisit de la jeune femme et lui plaqua une main sur la bouche l'empêchant de crier pour rassembler les renforts...Lincoln pointa son arme sur la tête de la première Dame des Etats-Unis. Caroline Reynolds se retourna et se retrouva nez à nez avec l'arme de Lincoln Burrows, l'homme qu'elle avait fait accusé du meurtre de son frère...

Je vis un éclair de surprise briller dans ses yeux, mais il s'effaça instantanément, laissant place à un regard froid et mue d'indifférence...Cette femme était le self-control incarné...Un sourire sadique vint s'afficher sur ses lèvres et elle brava l'arme de Lincoln de ses paroles:

« Messieurs je crains que votre ascendance aux Anasazis ne soient pas des plus visibles pour les indiens à l'extérieur, ainsi que pour mon service rapproché...Je suis étonnée que le « Grand Michael Scofield » soit venu en personne se jeter dans la gueule du loup!!! Voilà une idée bien curieuse de la part des fugitifs les plus recherchés d'Amérique! »

La fureur de Lincoln était palpable et je commençais à redouter qu'il ne commette une erreur irréparable...Sa main tremblait alors qu'il tenait la Présidente en joue...Caroline Reynolds était magnifique de sang froid et d'ironie...Cette femme avait été à bonne école et détenait parfaitement les codes qui sciaient à sa profession...

La jeune femme gigotait dans tous les sens pour tenter de se défaire de l'emprise de Michael, et celui-ci avait le plus grand mal à la maintenir bâillonnée...

Lincoln prit une profonde inspiration et rajusta son arme entre les deux yeux de la Présidente:

« Je ne compte pas vous tuer, cela ferait de moi ce que je ne suis pas: un assassin...Et cela vous arrangerez sans doute! Je suis venu pour vous avertir que nous sommes parfaitement au courant de vos malversations. Je souhaite votre déchéance, et bien plus encore, je l'espère longue et douloureuse...Nous retenons prisonnier l'un de vos hommes de main et nous le forcerons à témoigner de ce qu'il sait devant un Tribunal de Grande Instance...Vous ne duperez plus personne Reynolds...Je me battrais pour que Justice soir faite!! »

Je pouvais sentir l'électricité dans l'air, cette confrontation entre la victime et son bourreau était l'apogée de nos quêtes respectives...Le vent venait de tourner, n'étaient plus bourreau et victime ceux que l'on croyait...Nous la tenions et nous la ferions tomber...

« Comme ça vous avez mis la main sur ce brave Paul...Comment va t-il au fait? J'espère que vous le traitez bien au moins...quoique, cela n'a que peu d'importance au fond, puisque Paul Kellerman n'existe plus!! Il est mort au cours d'une mission classée Secret-Défense, nous n'avons jamais retrouvé son corps!! Ainsi s'ils vous prenez l'envie de le faire témoigner devant la justice, ses déclarations ne pourraient être recevables!!! Comme c'est dommage en effet!! Je suppose que vous n'avez pas plus de pièces contre moi...C'est bien ce que je pensais!! Je vais donc mettre fin à ce petit entretien que je trouve des plus déplaisants, et je vous conseille de courir vite, si vous ne voulez pas avoir à faire à mes hommes. Ils ne devraient plus tarder à venir me chercher maintenant!!! »

Cette femme avait décidément des ressources illimitées...L'affronter s'était affronter le système américain tout entier...Sans plus de preuves tangibles contre elle, nous étions de petits pions sur son gigantesque échiquier!!!
Elle n'avait cessé de sourire froidement alors que Lincoln continuait de la tenir en joue...La scène paraissait figée dans le temps et l'espace...

Soudain, la jeune femme réussie enfin à se libérer des bras de Michael et se mit à hurler de toutes ses forces pour alerter l'extérieur...Lincoln rangea son arme dans sa poche à regret et attira son frère vers le fond de l'église afin de rejoindre la sacristie...Alors qu'ils parvenaient à la porte séparant l'église du petit bâtiment annexe, les hommes de la Présidente jaillirent par l'entrée principale et l'un d'eux tira une salve de balles qui ricocha sur les piliers de la petite mission...

Je n'avais jamais courue aussi vite de ma vie, le vent du soir me sifflait aux oreilles et je me retournais parfois pour voir si nous avions réussie à mettre de la distance entre nos poursuivants et nous!!
Nous avions l'avantage du terrain et notre repérage de fin d'après-midi nous fut favorable, rapidement nous repassâmes devant les petites maisons qui fermaient le village sur l'arrière, retraversâmes la grange et sortîmes finalement sur le petit chemin caillouteux où nous avions caché notre véhicule...

Lincoln se mit au volant le premier et démarra la voiture tous feux éteins, j'arrivais la derrière et grimpais rapidement à l'arrière alors que la voiture commençait à rouler...
Lincoln s'engagea de nouveau par la route entre les deux canyons et appuya à fond sur l'accélérateur!! Je voyais au loin les phares du véhicule des hommes de Caroline, ils ne nous laisseraient pas nous en tirer...Il nous fallait sortir de ce boyau au plus vite...

Enfin, après de trop longues minutes sur ce terrain impraticable, la route nationale nous apparus...Lincoln donna un violent coup de volant vers la gauche nous entraînant dans la direction d'Albuquerque...Nous ne leur échapperions pas si nous retournions immédiatement à Gila, mais nous pourrions certainement les perdre dans le périphérique de la capitale du Nouveau Mexique.

Lincoln n'avait pas rallumé ses phares et espérait toujours devancer les hommes de la Présidente suffisamment pour se fondre dans le noir et nous débarrasser d'eux définitivement...Mais ils étaient coriaces et si ils ne nous avaient pas encore rattrapé, ils ne nous lâchaient pas pour autant!!!

Les premières lumières de la banlieue d'Albuquerque nous apparurent enfin et Lincoln finit par allumer les phares, il ne servait à rien de se faire arrêter par les Forces de Police!!!
Rapidement il prit à droite en direction du périphérique Sud de la ville et s'engouffra dans la circulation sans encombre. Il se faisait déjà très tard, mais la ville continuait de vivre comme en pleine journée et les routes ne désemplissaient pas...Les hommes de la Présidente nous suivirent encore quelques kilomètres, mais Lincoln réussie à les semer en bifurquant par une sortie dénichée à l'intérieur d'un tunnel...
La sortie débouchait sur un pont aérien reliant deux autres périphériques, nous venions de passer le centre névralgique de la Capitale.

Quand enfin nous fûmes certain de n'être plus suivis, Lincoln rebroussa chemin et nous ramena à l'hôtel de Gila ou le reste du groupe devait se faire du souci...

Lincoln laissa la voiture à l'entrée du « Freedom House » et nous nous dirigeâmes rapidement vers notre bungalow, il était maintenant plus de 3 heures du matin et il ne fallait pas attiser les curiosités!!

Michael s'arrêta à quelques mètres du bungalow et se tourna vers nous d'un air inquiet. Une voiture de type standart était garée devant, et il n'y avait personne à son bord. La porte du bungalow était entrouverte et il y avait des traces de terre sur le perron!!

Lincoln sortit son arme et entra précipitamment à l'intérieur, Michael et moi-même sur ses talons...
L'arme braqué devant lui, Lincoln ne put que constater la scène que lui offrait la salle à manger:
Kellerman était bâillonné et ligoté à une chaise du salon et Sucre reposait sur la table centrale inconscient!! Il n'y avait aucune trace de Sara...

Michael se précipita à la recherche de Sara et disparu rapidement dans les pièces concomitantes à la salle à manger en l'appelant...
Lincoln s'approcha de Sucre et tenta de le réveiller doucement...Dieu seul savait ce qu'il avait put subir!!

« Sucre, réveille-toi!!! Sucre tu m'entends?? »

Le portoricain semblait complètement assommé car il ne réagit même pas aux vaines tentatives de Lincoln.
Michael revint dans le salon et prit le parti de secouer plus énergiquement son ami:

« Sucre, est-ce que tu m'entends?? Bon sang, dis-moi ce qui s'est passé ici?? Sucre, Sucre!! Où est Sara?? »

Fernando émergea enfin de sa longue léthargie et bailla en se frottant les yeux, alors que Michael continuait à l'invectiver!!

« Hein? Quoi, mais qu'est-ce que tu dis "papi", arrête de me crier dans les oreilles j'suis pas sourd...

- Mais qu'est-ce qui vous est arrivé? Sucre, concentre-toi s'il te plaît, où est Sara?

- Attend, une seconde...Relax les mecs, vous m'avez l'air bien énervés...Bon sang mais il est plus de 3 heures du matin...C'est pas humain de réveiller les gens à une heure pareille...

- Comment ça « réveiller les gens »?? Tu dormais?? Je ne peux pas le croire...Sucre je t'avais confié une mission, comment peux-tu dormir dans un moment pareil!!! Et Kellerman pourquoi est-il attaché??? Et Sara, où est Sara??? »

Notre inquiétude avait prit le pas sur notre rationalité et alors que Michael tentait de trouver des réponses auprès de Sucre, aucun de nous n'avait pensé à détacher Kellerman qui commençait à s'agiter furieusement sur sa chaise.
Le visage rouge de colère, il paraissait pitoyable avec son bâillon enfoncé dans la bouche. La personne qui l'avait ligoté avait du métier en la matière! Ses mains étaient retenues grâce à un système de noeuds complexes qui se resserraient au fur et à mesure que le prisonnier tentait de se libérer.
Je m'approchais de lui et m'activais pour défaire les noeuds:

« Amy, laisse-le attaché, il l'a bien mérité!! Mais asseyez-vous, "por Dios" vous me filez le tournis!! J'vous jure c'est pas humain de vivre en groupe, personne ne respecte mon cycle de sommeil...Et puis vous en avez mis du temps...Mais qu'est-ce que vous avez fait?? Alors, vous avez vu Reynolds?? »

Sucre qui sommeillait encore voilà quelques minutes, paraissait soudain beaucoup plus réceptif et sa curiosité l'avait emporté sur sa sieste improvisée!!

« Sucre, réponds à Michael, où est Sara?? Et pourquoi avez-vous attaché Kellerman?

- Sara? Je sais pas, elle est sûrement partie se dégourdir les jambes!! Quand à Kellerman, disons qu'il était un peu trop bavard à mon goût et puis remuant par dessus le marché!! Au moins maintenant, il ne dérange plus personne! »

Les explications de Sucre étaient toujours simples et concises et sa façon de percevoir le monde encourageait le groupe à se défaire de ses appréhensions inutiles. Encore une fois, il avait régler le problème d'une manière peu conventionnelle, mais très efficace, et le fait de voir Kellerman ainsi asservi me procura un plaisir inégalé...

Soudain, la porte du bungalow grinça et Sara surgit dans le salon, cachée derrière un amoncellement de sacs en papier kraft. Titubant sous le poids de son chargement, elle posa maladroitement le tout sur la table et poussa un soupir de soulagement!
Michael se précipita sur elle et la serra dans ses bras comme s'il ne l'avait pas vu depuis des siècles...Un ange passa! Revenant à la réalité, il se détacha d'elle brusquement et dit d'un ton détaché:

« Amy s'est inquiétée de ne pas te trouver quand nous sommes rentrés, et Sucre, cette marmotte, s'est endormis sur la table et ne t'a même pas vu sortir!! Enfin, l'essentiel c'est que tu sois là maintenant...C'est quoi tous ces sacs?? »

Lincoln, Sucre et moi nous regardâmes complices, un petit sourire de connivence aux coins des lèvres, mais aucun de nous ne fit le moindre commentaire!!
Sara qui ne semblait pas dupe de la petite prestation de Michael tenta de cacher les soudaines rougeurs de son visage et s'activa aussitôt pour ouvrir les différents sacs qu'elle venait de déposer, en sortant des victuailles de toutes sortes.
Mais elle se ravisa, fit demi tour et sortit du bungalow à la surprise générale du groupe!

Moins d'une minute passa et elle revint dans la pièce l'air embarrassée...:

« Le pauvre je l'avais presque oublié dehors...!! Quelle tête en l'air je fais parfois!! Lincoln, Michael, j'ai une surprise pour vous... »

Ainsi introduit, un homme franchit le seuil de la porte d'entrée.
De taille moyenne, il était vêtue d'un vieux jean, d'une veste d'aviateur en cuir râpée aux coudes et d'une casquette des « Chicago White Sox » vissée sur sa tête.
La couleur de ses yeux et la forme de son nez me rappelait quelqu'un, mais sur le coup je ne fus pas très perspicace...
Son regard était emplie d'une sorte de tristesse contenue et son visage paraissait marqué par les épreuves et le temps...Cet homme-là avait dût voir le monde!!

Il s'avança dans la pièce et sourit timidement au groupe avant de s'adresser aux deux frères:

« Bonsoir les garçons, ça fait bien longtemps...! »

La stupéfaction était clairement inscrite sur le visage de Lincoln et Michael...

Sara fut la première à réagir et invita l'homme à prendre place autour de la table:

« Aldo, ne restez pas debout, vous avez fait un long voyage...Prenez un siège! Quand à moi, je vais vous cuisiner quelque chose, je crois que nous avons vécu beaucoup de choses ce soir, et manger est le remède idéal pour se remettre de nos aventures. »

Le pragmatisme de Sara tranchait totalement avec l'atmosphère étrange qui régnait dans la pièce depuis l'arrivée de cet homme mystérieux...Je ne le connaissait pas et Sucre non plus.

L'effet surprise passé, Lincoln s'approcha lentement de l'homme et vint lui donner une franche poignée de main, accompagnée d'une accolade familière:

« Salut Papa, je savait bien que je n'étais pas fou et que je t'avais aperçu le jour où ils m'ont conduit à la chaise électrique...C'est toi qui nous a obtenu ce sursis, n'est-ce pas? »

L'homme acquiesça, humble...

Cette fois, la stupéfaction était partagée, car Sucre, Kellerman -qui était toujours attaché, mais ne ratait pas une miette des événements-, et moi nous regardâmes perplexes! Ce visiteur nocturne était donc le père de Lincoln et Michael!
Nous assistions à de biens étranges retrouvailles...

Alors que Lincoln semblait heureux du dénouement des événements de la journée, Michael était resté à bonne distance et ne paraissait pas vouloir saluer son père! Le visage fermé, il accusait le coup de ses retrouvailles impromptues!

Doucement, Aldo se dirigea à sa rencontre, le saisit par les épaules maladroitement et l'enserra finalement de ses bras. Michael, était resté debout, raide, les bras ballants le long du corps, il se laissa faire mais ne lui rendit pas son accolade:

« Fils, je sais que tu m'en veux...Je sais aussi que tu crois que je vous ai abandonné ta mère et toi, mais Micky, les circonstances ne sont pas celles que tu imagines...

- Ne m'appelle pas Micky! Pour moi, tu es mort...Disparu il y a plus de 25 ans et je ne veux pas savoir ce que tu as fait toutes ces années...Seuls, on a vécu seuls avec Linc, lorsqu'elle est morte...Mais où étais-tu, que faisais-tu durant ses heures d'agonie à l'hôpital? Tu n'es même pas venu le jour de l'enterrement!!

- Tu te trompes... »

Aldo paraissait las, vidé par les événements de sa vie...Le regard embué, le dos voûté, il subissait la colère amplifiée par les années, d'un fils en mal d'explications, en mal de reconnaissance et d'amour...:

« J'étais là pour ta mère, j'ai toujours été là...Elle ne se savait pas condamnée, moi si, je me suis chargée d'organiser ses funérailles et j'ai fait en sorte que vous ne soyez pas séparés ton frère et toi!!

- Et bien c'est réussi, ils ont collé Linc dans un centre pour adolescents difficiles et j'ai écumé les familles d'accueil, pas toujours pour mon plus grand plaisir!!!On était une famille, bon sang!! Tu aurais dus nous prendre avec toi...mais tu avais sans doute mieux à faire, que prendre soin de tes deux fils!!

- Tu es injuste Michael, je ne pouvais pas vous emmener avec moi, c'était bien trop dangereux...Et je n'ai jamais cessé de veiller sur vous...Aujourd'hui je suis là pour réparer mes erreurs passées et j'ai les réponses à vos questions! »

L'arrivée de Sara et de son plat fumant et alléchant calma les esprits et nous permis à tous de souffler le temps d'un repas...

♦♦♦♦♦♦

Notre repas improvisé tourna autour de notre petite aventure à Pueblo de Acoma et nous mirent au courant les autres de notre rencontre vaine avec Caroline Reynolds...
Aldo n'avait pas fait un seul commentaire, mais semblait impressionné par notre petit voyage...

Kellerman que nous avions libéré de son bâillon et de ses nœuds, afin qu'il participe au repas, paraissait particulièrement sombre et se mit à jurer quand nous lui relatâmes sa « pseudo disparition » orchestrée par la Présidente elle-même, afin qu'il ne puisse pas témoigner de son plein gré!

Les conversations allaient bon train, cependant aucune ne s'était encore penchée sur le cas d'Aldo et de ses fils, comme si ce repas repoussait la confrontation à des temps ultérieurs...
Pourtant, c'était sans compter sur le trublion du groupe à qui jamais rien n'échappait!!!

« Chu m'abais chamais barlé de kon bère "babi"... »

Sucre la bouche pleine, venait d'apostropher Michael. Sa main s'agitait comme un éventail devant son visage, il tentait de se faire de l'air, car il avait visiblement ingurgité un peu trop rapidement une bouchée chaude de lasagnes...

Si personne n'avait compris ce que tentait de dire Sucre, tout le monde était unanime quand aux talents de cuisinière de Sara, qui nous avait régalé d'un plat de lasagnes fait par ses soins.

Sucre déglutit péniblement, essuya ses lèvres rougies par la sauce tomate et se pencha vers Aldo qui était assis à sa droite:

« ...sont pas bavards vos fistons concernant la famille...J'étais le compagnon de cellule de Michael, on a tout partagé ensemble...et moi je lui ai parlé de Maricruz dès qu'il est arrivé...(à l'écart en chuchotant) Maricruz "es la mujer de mi vida, pues"!!! En tout cas, il m'a jamais parlé de vous...j'me demande bien ce que vous leur avez fait pour qu'ils soient si en colère contre vous...??!! »

La curiosité de Sucre était parfaitement déplacée, une fois encore, mais elle fit sourire Aldo, qui jusqu'alors paraissait terriblement tendu...Son regard s'éclaira, puis sur le ton de la confidence il chuchota à Sucre:

« Moi aussi, j'ai entendu parler de Maricruz...Quand doit-elle accoucher? Connaissez-vous déjà le sexe du bébé? »

L'étonnement de Sucre n'était pas feint et il hocha la tête répondant par la négative...
Puis Aldo, reposa ses couverts, bu une gorgée d'eau et inspira profondément:

« Sara, je vous remercie pour ce repas, vous êtes un vrai cordon-bleu...Mais j'avoue que cette petite diversion n'a fait que repousser le moment où je devrais m'expliquer...et à moins que vous nous gratifiez d'un fabuleux dessert, je crois qu'il est l'heure que nous parlions sérieusement! »

Il se leva et alla s'installer dans l'un des fauteuils qui composait le petit coin salon du bungalow...Chacun quitta la table et vint se placer autour de lui, afin d'entendre mieux ce qu'il avait à nous révéler...
Michael fut le seul qui resta un peu à l'écart...Le regard froid, le visage crispé, il prit le partie de ne pas se joindre au groupe et resta volontairement autour de la table à manger.

Aldo débuta son récit:

« Je suis partie de mon foyer alors que Lincoln et Michael étaient encore très jeunes...Leur mère, Christina connaissait une partie de mes activités professionnelles et s'accoutumait de mes déplacements réguliers à l'étranger...Cependant, lorsqu'elle est tombée gravement malade, je n'ai put que gérer la situation à distance, car j'étais terriblement accaparé par mon travail, et à l'époque je ne jurais que par mon poste et mon statut...Le jour où elle est décédée, j'ai fait placer les garçons, car je me savais incapable d'être un bon père pour eux, et mon emploi, encore, ne me laissait pas le temps de me dévouer à ma famille...

- Je ne comprend toujours pas pourquoi Linc porte le nom de famille d'un type qui n'a jamais eu aucune considération pour ses enfants!!

Michael qui paraissait particulièrement touché par les aveux de son père, avait marmonné si fort que tout le monde se retourna surpris...:

« Je ne cherche pas à me faire excuser pour mon comportement passé, Michael! Il faut simplement que tu comprennes que j'ai intégré un système d'où il était difficile de s'échapper...Cela te permettra peut-être de me pardonner pour les choix que j'ai eu à faire au cours de ma vie...

- Ca j'en doute fort!! » lui répondit Michael avec une pointe d'ironie.

Aldo ne releva pas le sarcasme et poursuivit son récit à destination des autres membres du groupe...:

« Lorsque Michael est né, j'avais un poste administratif au sein du gouvernement...J'étais un travailleur acharné, et je me donnais corps et âme à mes tâches...Cette passion pour ma vie professionnelle s'est rapidement révélée très positive pour ma carrière, et au bout de quelques années, j'ai été contacté par un cercle fermé de Hauts Dignitaires se faisant appeler "La Compagnie". Leur directoire souhaitait me confier un poste délicat laissé vacant à l'époque...J'ai évidement sauté sur l'occasion et accepté toutes les conditions! J'ai été envoyé à l'étranger, pour prendre mes nouvelles fonctions...Je devais gérer les portefeuilles financiers de gros clients étrangers et veiller à ce que leur argent et leurs intérêts ne soient jamais remis en question...Je venais de m'installer dans un Paradis fiscal et ces nouvelles responsabilités allaient bien au delà de tout ce que j'aurai put souhaiter professionnellement...!! J'ai été récompensé de mon travail par des avantages en nature et de nombreux avantages fiscaux, mais en contre-partie j'ai dut m'éloigner de ma famille pour des raisons de sécurité, et dévouer ma vie entière à ce nouveau boulot!

- Dire que j'ai pensé que tu n'étais qu'un pauvre type et que tu avais certainement fini sans boulot et sans toit...Pendant tout ce temps, tu brassais des millions et tu te dorais la pilule dans un pays défiscalisé!!!C'est dingue comme on ne connaît pas sa famille parfois!! »

Lincoln se massait le crâne d'une main distraite et semblait plongé dans des considérations qui n'appartenaient qu'à lui et qui passaient visiblement très haut dessus de celles du groupe!!

Sucre, comme toujours, fût celui qui recadra le débat en s'adressant à Aldo avec toute la franchise que je lui connaissais:

« Je ne vois pas en quoi vous répondez à nos questions..."Felicidades" vous avez eu une brillante carrière, mais c'est quoi le rapport avec la Présidente et son frère pas mort?? »

Puis se tournant vers Michael pour avoir son approbation:

« Franchement, j'ai pas raison "papi"?!! »

Sucre était comme ça, prêt à défendre son ami par tous les moyens et comme celui-ci semblait aux prises avec son père, il avait trouvé bien de venir l'épauler dans sa quête ardue de vérité!!! Ce type possédait un vrai cœur pur, c'était à n'en pas douter!!!

Aldo se racla la gorge et reprit sans ciller:

« Ne soyez pas si impatient Fernando, j'y arrive et vous allez comprendre que toute ma vie est étroitement liée avec les affaires qui vous occupent chacun...J'étais en charge de tous ces portefeuilles financiers et donc détenteur d'un certain nombre de secrets hautement gardés...Les clients de l'époque étaient pour la plupart des chefs d'entreprises qui laissaient dormir leur pécule bien au chaud et à l'abri des taxes pour un jour récupérer les fruits de leurs transactions et les réinjecter de nouveau sur le marché mondial...Cela n'avait rien d'illégal et c'était même une pratique courante...Mais voilà quelques années, de nouveaux clients ont fait leur apparition dans ce petit monde très fermé...Des clients pas toujours très fréquentables!!!
"La Compagnie" a commençait à diversifier ses activités et s'est soudainement intéressée de très prêt à la politique des grandes puissances mondiales...Son directoire était alors composé d'un petit nombre d'hommes très influents dans le monde. Venant d'univers variés, ils étaient politiciens, tacticiens, militaires ou même trafiquants!!! Cette reconversion progressive de la "Compagnie" avait quelque chose de dangereux, mais une fois que l'on y était associé, on ne pouvait plus en sortir...Il vous faut comprendre que mes responsabilités au sein du groupe étaient telles que j'étais tout simplement prisonnier du système qui m'avait élevé et consacré!!! Je vous ferais grâce des menaces qui ont pesé sur ma famille et mes deux fils afin de s'assurer de mon entière coopération!!!
"La Compagnie" avait l'habitude de gérer toutes ses branches avec beaucoup d'attention et elle possédait un droit de regard sur bon nombre d'activités parallèles...Sa force principale était de mener son développement comme un grand propriétaire de chevaux gérerait son paddock!!! Elle ne pariait que sur ses propres poulains...et ce système était imparable!! Du moins jusqu'à l'affaire qui nous occupe!!
Il y a quelques années, "la Compagnie" a misé sur une jeune politicienne inconnue. Ambitieuse, intelligente, mais surtout dénuée de toute moralité, elle était la candidate idéale aux nouveaux objectifs de "la Compagnie". Cette femme serait sûrement restée dans l'ombre si elle n'avait pas reçu le coup de pouce nécessaire pour intégrer les hautes sphères de la politique...Caroline Reynolds venait d'être recrutée par "la Compagnie"...!!! »

Je me tournait vers Kellerman et le regardait avec stupeur:

« Vous étiez au courant que Reynolds faisait partie de "La Compagnie"? Bon sang, vous n'auriez pas oublié de nous donner quelques détails significatifs par hasard??!!!!

- Les mécènes de Caroline n'ont jamais fait connaître leur geste au grand jour...Et même si je savais qu'elle n'avait pas pu accéder à son poste de Sénatrice seule, je n'ai jamais demandé à en savoir plus que ce qu'elle souhaitait bien me communiquer!!!

- Mouais, vous êtes pas bien curieux comme chef de la sécurité...Mais bon, passons...Aldo, pardonnez-moi de vous avoir interrompu!

- Je vous en prie, Agent Lawrence, votre colère est tout à fait justifiée...!!

- Appelez-moi Amy, et ma colère ne devrait pas prendre le pas sur ma rationalité...Je suis juste sidérée de découvrir que toute cette machination est bien plus importante que tout ce que je pensais! Votre "Compagnie" possède un tel réseau que j'ai peine à croire que tout cela existe...

- Je comprends votre surprise, et tout comme vous j'ai été vite dépassé par l'étendu d'action de "la Compagnie"...Cependant, il y a trois ans, un événement à tout changé et ma vie a basculé!!
Caroline Reynolds venait d'être élue à la tête du Congrès et préparait activement sa campagne présidentielle..."La Compagnie" était son principal mécène et misait gros sur ses facultés à faire changer la politique alors en place...Il n'y avait là rien de frauduleux. Mais Reynolds est une femme impitoyable et terriblement manipulatrice...Elle a rapidement compris à quel point l'argent de "la Compagnie" pourrait lui être bénéfique...Elle s'est donc chargée de se trouver d'autres mécènes pour financer les fonds de sa campagne, et avec l'argent que lui versait "la Compagnie" elle s'est ouvert un certain nombres de comptes offshores afin de financer ses activités les plus illégales...On parle de chantages, de corruptions de magistrats à sa cause, mais surtout elle achetait le silence sur les activités, disons, discutables de l'entreprise de lobbying de son frère Terrence Steadman...la seule ombre à son tableau de chasse politique!!
Sa plus grosse erreur est d'avoir ouvert l'un de ses comptes au sein du service dont j'étais alors le Directeur, dans le Paradis Fiscal où je travaillais...Ce transfert d'argent étonnant, m'a rapidement mis la puce à l'oreille et j'en ai informé les Hautes sphères...Tout aurait pu se résoudre là, si "la Compagnie" n'en avait pas pris son partie...Lorsque le Directoire a été informé de la duperie de Caroline Reynolds à leur égard, il a d'abord sévi dans un premier temps...mais c'est ensuite consacré à la soutenir de façon bien plus poussé, quitte à faire d'elle un simple pion pour parvenir à un plus grand dessein pour l'Amérique...
A partir de ce moment j'ai compris que je ne sortirais plus jamais du système, à moins de le démanteler entièrement et de le faire chuter de l'intérieur... !!! »

Michael assis de l'autre côté de la pièce suivait le récit de son père avec beaucoup d'attention:

« Cette décision t'honore, mais ça ne s'est évidement pas passé comme prévu, n'est-ce pas?? Laisse-moi deviner!!! Tu as rassembler des preuves, tu as dut réussir à faire trembler ta "Compagnie"...Mais comme ils sont plus puissants que toi, ils ont décidé de te rappeler qui était le patron et il s'en sont pris à Linc!!! Je chauffe, non!! »

Les explications d'Aldo étaient sensées apaiser les esprits, mais celui de Michael bouillonnait et il ne décolérait pas contre son père...Je savais par Sara, à quel point il se sentait responsable pour les événements qui avaient découlé de son évasion de Fox River, et je comprenais ses sentiments face à la terrible vérité...Il s'était martelé pour de fausses raisons et le comportement d'Aldo, les décisions de ce père absent, avaient plongé ses deux fils dans la tourmente, ainsi que tous ceux qui avaient un jour croisé leur route...Cela avait quelque chose de rageant!!!

« La moindre des choses était de m'armer contre "la Compagnie" pour faire connaître ses malversations au grand jour...Ils ont bien évidemment été les plus forts, et non tu ne te trompes pas Michael, ils s'en sont pris à Lincoln pour me faire "sortir du bois"!! Quelle meilleure stratégie que de faire disparaître à la fois un homme corrompue, qui porte préjudice à la future Présidente des Etats-Unis, femme sur qui tous les espoirs du Directoire reposaient et d'accuser de ce meurtre, le fils aîné de la personne qui possède le plus de preuves contre ce même Directoire...

- La réponse est: stratégie idiote, car avec l'étalage de tes pseudos preuves au grand public, on aurait relâché Linc, et tu aurais fait tomber cette "Compagnie", et jamais Caroline Reynolds ne serait devenue Présidente des Etats Unis!!!

- Sans doute, mais vous seriez morts tous les deux, et je préférais savoir Lincoln sain et sauf en prison et toi menant ta vie, que de vous porter préjudice plus que je ne l'avais déjà fait...Je croyais aussi que la petite Véronica Donovan réussirait à prouver l'innocence de ton frère et que celui-ci reverrai rapidement le jour...Mais tout a été de travers...Les preuves que j'avais laissé à Véronica ne lui
sont jamais parvenu, Lincoln a écopé d'une condamnation au couloir de la mort, et toi tu as trouvé bon de te faire enfermer à Fox River pour tirer ton frère de là...

- Véronica est morte à cause de moi, alors qu'elle tentait de trouver des indices pour prouver mon innocence...Les preuves que tu as tenté de lui envoyer lui sont peut-être parvenu finalement!!! Qui sait d'ailleurs ce qu'elle avait découvert!

- J'avais envoyé à Véronica la preuve formelle que Terrence Steadman était encore en vie, et qu'on t'avait donc accusé et emprisonné à tort...Je sais par mes sources internes qu'elle a été tuée alors qu'elle venait de retrouver sa trace, et qu'elle s'apprêtait à le faire chanter pour obtenir ta grâce auprès de sa soeur...

- Bon sang, Véro avait réussie alors...Mich, elle a donné sa vie pour moi...Et toi aussi!! »

Pour la première fois depuis notre rencontre, je percevais la détresse de Lincoln Burrows. Cet homme qui semblait fort comme un roc à l'extérieur, était habité de démons et de douleurs enfouies...Cette Véronica Donovan avait dut beaucoup compter pour lui, car il lui paraissait très attaché...Je déplorais la disparition d'un nouveau maillon dans cette chaîne folle!!!

« Elle n'est pas morte en vain, Lincoln!! Avant de se faire attraper par "la Compagnie", elle a réussie un coup de maître...et cela risque de te sauver la vie définitivement...Ainsi qu'à nous tous!! Véronica a filmé Terrence Steadman, vivant et reclus dans une maison payée par "la Compagnie"...Je suis en possession du film, et nous allons l'utiliser!!! Jusqu'à maintenant, nous avons tous joué de malchance...mais je ne désespère pas de voir la roue tourner et la chance nous sourire dorénavant!!! »

L'optimisme d'Aldo était déconcertant aux vues de l'état des choses et je me demandais ce qui continuait à le motiver de la sorte...Bien sûr il avait tenté de démanteler "la Compagnie"une première fois, mais au final, ces deux fils étaient les hommes les plus recherchés d'Amérique, et lui-même avait sans doute un contrat sur la tête lancé par le Directoire...J'espérais que le film de l'amie de Michael et Lincoln serait suffisant pour parer à toutes ces malversations, et permettre à chacun de tirer son épingle du jeu, car il était certain que nous avions beaucoup à perdre!!!

« J'aurais aimé que mon père soit encore des nôtres, il nous aurait sans doute aidé, même s'il est resté très septique lorsque je lui ai parlé du cas de Lincoln la première fois...Il avait les contacts nécessaires et l'influence pour faire basculer une situation d'un côté ou de l'autre!! Quel gâchis, vraiment...!! »

Les sanglots dans la voix de Sara trahissaient le deuil de son père encore bien présent, et même si elle avait fait preuve d'une grande force de caractère durant toute notre aventure, elle n'en était pas moins marquée pour autant!!

Aldo posa sa main sur le bras de Sara à la manière d'un père et pendant un instant respecta le silence qui s'imposait, puis il prit ses deux mains dans les siennes et s'adressa à elle les yeux dans les yeux:

« Sara, votre père était un homme extraordinaire et courageux...Vous lui ressemblez beaucoup! Vous pouvez être fière de lui, car contrairement à ce que vous pensez, il m'a été d'une grande aide...Lorsque j'ai eu besoin d'un soutien extérieur à "la Compagnie" pour faire sortir les preuves que je détenais, j'ai fait appel à lui et je lui ai fournis les éléments nécessaires pour le convaincre de l'ampleur de ce qui se tramait...Il n'a jamais été impressionné par ce que je lui faisais savoir et rapidement il s'est mis à oeuvrer pour faire éclater la vérité!!
Malheureusement, il aura été trahie par une personne proche de lui et les hommes de la Compagnie ont signé son arrêt de mort!!

- Les hommes qui ont tué mon père sont donc les même hommes qui vous traquent et qui agissent dans l'ombre de la Présidente??

- Oui Sara, et votre père possédait une preuve irréfutable contre la Présidente, preuve que je lui avais moi-même fournis, mais celle-ci a disparu après son décès!!

- Vous êtes « Badger »?? Les lettres à mon père, elles venaient de vous, n'est-ce pas?? C'est vous qui lui avez fait parvenir le petit carnet noir?? Oh mon Dieu, mon père n'est peut-être pas mort pour rien!!!

- Comment êtes-vous au courant des lettres Sara? Votre père vous a t-il mis au courant de nos échanges réguliers...Attendez, je crois comprendre, c'est pour cela que vous avez laissé la porte de votre infirmerie ouverte aux garçons ce soir-là à Fox River...!!! »

La conversation entre Aldo et Sara avait quelque chose d'impénétrable...une telle intimité s'était installé entre eux, que personne autour n'avaient tenté de rompre ce dialogue si essentiel...
Je voyais les yeux de Sara briller d'une nouvelle lueur...Elle semblait reprendre courage, et je l'enviais un peu d'avoir enfin les réponses à ses interrogations...Cet homme, père de Lincoln et Michael était providentiel avec tous ses secrets, et même si tout le monde ne partageait pas mon avis concernant l'importance de sa présence parmi nous, chacun reconnaissait qu'il nous avait apporté l'espoir et la lumière au bout du tunnel...:

« Je n'ai pas eu connaissance des investigations de mon père, et durant toute la durée de l'emprisonnement de Lincoln, il n'a jamais fléchie quand à sa position concernant la peine de mort...Mais après l'évasion, alors que j'étais soupçonnée de l'avoir facilité, il m'a contacté me demandant de le rejoindre rapidement pour parler d'une chose importante...C'était le jour où je l'ai retrouvé mort...J'ai découvert le petit carnet noir sur lui et l'ai gardé tout ce temps, en espérant que je trouverais un sens au charabia qu'il contient...ainsi que des réponses concernant la mort de mon père...Pour moi, il ne pouvait pas s'être suicidé!! Quand aux lettres, j'ai mis la main dessus bien plus tard, et grâce à Amy!!! »

Aldo se tourna vers moi avec un regard de gratitude et s'adressa à tout le groupe:

« Ce carnet est la preuve formelle des comptes offshores de la Présidente, des numéros cryptés, des symboles et des destinations pour l'argent...Dites-moi que vous l'avez gardé avec vous, et que nous allons pouvoir nous en servir!!

- Notre départ pour Gila a été tellement précipité que nous n'avons pas pris le temps de récupérer le carnet à Chicago...Il faut dire que notre rencontre avec Sara a été épique, ainsi que les épreuves que nous avons traversé pour parvenir jusqu'ici!! Je suis navrée, Aldo, mais je crains fort qu'ils nous faillent repartir à Chicago pour récupérer le carnet!! »

J'étais désolée que nous n'ayons pas pris plus le temps de la réflexion concernant cet objet et de n'avoir pas été plus convaincante avec Sara, pour que celle-ci me mène à la cachette du petit carnet noir...

« Ne vous inquiétez pas Amy, nous avons le film de Véronica et cette preuve est la plus importante pour faire chanter Caroline Reynolds...Nous pourrons récupérer le petit carnet plus tard, cela nous permettra d'aviser si celle-ci possède encore quelques As dans sa manche...Mais je n'en suis pas sûr, et je crois que cette fois-ci nous aurons l'avantage!!! »

Sara quitta son fauteuil et se dirigea vers l'une des chambres du bungalow. Elle revint quelques secondes plus tard, avec le grand sac qui lui servait de fourre-tout.
D'un mouvement rapide, elle retourna le sac au dessus de la table et la totalité de son contenu se répandit face à Michael!
Curieux, nous nous approchâmes pour mieux voir ce que Sara avait à nous livrer. Sa perruque blonde emmêlée était juchée sur ses affaires personnelles: une trousse de toilette, une bombe lacrymogène miniature, le nécessaire de premiers soins avec lequel Sara avait pansé mes fractures, un portefeuille, des stylos, quelques vêtements de rechange et un petit agenda couleur pivoine...
Je regardais ce butin avec surprise et ne fis pas le rapport immédiatement avec la conversation qui venait de s'achever...
Sara prit le petit agenda, enleva la couverture pivoine qui le protégeait, et fit glisser le carnet noir devant Aldo:

« Le voilà votre petit carnet noir...Je ne m'en suis jamais séparée...Lorsque je l'ai trouvé sur mon père, j'ai eu comme un pressentiment, et puis je l'ai conservé comme étant la dernière chose que j'avais reçu de lui après sa mort, un objet de superstition ou un porte-bonheur en quelque sorte!! Je n'ai jamais eu la moindre idée de ce qu'il renfermait...tous ces codes, ces symboles, cela n'avait aucun sens...et encore moins de trouver le tout sur mon père mort!! Je suis heureuse de pouvoir le rendre à son vrai propriétaire et je sais que grâce à ce carnet je vais pouvoir rendre justice à mon père, le Sénateur Franck Tancrédi!! »

J'étais un peu déçue par le comportement de Sara, qui m'avait parlé, il est vrai, de ce petit carnet noir, mais n'avait pas cru bon de m'informer qu'il était en sa possession, avec nous durant tout ce temps...Finalement, tout le monde avait ses petits secrets autour de cette table, et ce n'était peut-être pas si mal!!!

Aldo feuilleta le petit carnet et le glissa dans l'une des poches intérieures de son blouson, il s'essuya le front avec un mouchoir puis s'adressa à ses deux fils:

« Cette fois, nous sommes parer et nous aurons gain de cause, je vous le promet...Je suis revenue pour expier mes fautes et faire payer les coupables de cette machination!! Avec votre aide les garçons...(se tournant vers le reste du groupe) et la votre, si vous êtes avec nous, nous allons confronter Caroline Reynolds une bonne fois pour toute, obtenir la grâce de Lincoln, de Michael et Sucre, venger la mort du père de Sara et récupérer la soeur de Amy et le fils de son collègue...Quand à vous Kellerman, lorsque tout sera terminé, estimez-vous heureux de repartir librement de votre côté, et je vous conseille vivement de pas trop traîner dans les parages....Qui sait ce qui pourrait advenir après ce que je m'apprête à faire...
Attendez-moi quelques heures, le temps que le jour se lève totalement, j'ai quelques détails à régler et nous pourrons partir!! »

Sur ce, il se leva, quitta la pièce et je le vis prendre place derrière le volant de la voiture que nous avions découvert devant le bungalow, sortir du parking, et disparaître dans la nuit!

Les dernières heures de la nuit furent longues et chacun tentait de vaquer à d'inutiles occupations pour palier le stress qui n'en finissait pas de nous ronger...
La sortie magistrale de Aldo avait laissé comme un goût d'inachevé et Sucre tournait en rond dans le bungalow comme un animal en cage:

« Il est pas croyable votre "padre", il se barre comme ça, sans explication et avec les preuves qui sont sensées nous sauver les miches, et il espère qu'on va rester les bras croisés en l'attendant sagement!!!
"Me estoy aguantando, pero esta situacion me jode un chingon...No creo que me voy a quedarme aqui mas, ahora, me voy a parar esta cabrona de Presidente... Dios, no es una vida...estoy encerrado en un puto cuarto y...ppfff" (*)

- Sucre, ça suffit, assieds-toi et tais-toi!! »

Le portoricain se stoppa net et regarda son ex-co détenu comme si il ne l'avait jamais vu...Michael, le visage toujours crispé, venait de perdre son sang froid pour la première fois depuis que je le connaissais. Même son père et les rancoeurs qui subsistaient à son égard n'avaient pas eu raison de son calme, et voilà que son meilleur ami, l'homme qui l'avait soutenu tout au long de cette aventure, recevait la somme de ses frustrations accumulées!!!

Michael poussa un profond soupir et se tourna vers Sara:

« Sara s'il te plaît, pourrais-tu nous faire du café, très serré, je crois que tout le monde a bien besoin d'une tasse!! Pardonnes-moi Sucre, je ne voulais pas te crier dessus, mais tu sais que ça me rend fou de te voir tourner en rond de cette façon...déjà à Fox River...

- Laisse tomber "papi", on est crevé, la nuit a été très longue et on est pas encore sortie de l'auberge, je comprend tu sais...C'est juste que je me sens parfaitement inutile et puis cela fait quelques jours que je n'ai pas eu de nouvelles de Maricruz, je m'inquiète un peu...

- Je suis sûr qu'elle va très bien, et je te promet que bientôt tu pourras la rejoindre!! »

Voilà, cette amitié était ainsi entre Michael et Sucre, empreinte d'un profond respect mutuel et d'une grande dose de sincérité et de confiance!!

Sara déposa de grandes tasses de café fumant devant chacun et nous prîmes le temps de savourer ce concentré d'énergie!!

Les tensions de la nuit et les révélations de Aldo avait eu raison de tous mes espoirs. Je comprenais à quel point je n'avais été qu'un pion du gouvernement, alors que je m'étais crue si indispensable dans cette traque mensongère!!!
Je ne cessais de fixer rageusement Kellerman et priais pour qu'il disparaisse définitivement de ma vie...Je l'observais souffler sur sa tasse de café et gratter nerveusement la nappe en toile cirée. Il ne semblait plus être si fière et si dénué de conscience!! Je l'espérais tourmenté par ces démons, comme je l'étais par les miens, et je souhaitais qu'il tienne parole et me rende Beth et Cam comme il nous l'avait promis...Malheureusement, je n'étais pas convaincue de sa sincérité à ce sujet et j'essayais d'envisager une solution pour le faire plier et me livrer la planque de ses otages s'il changeait d'avis après coup...

Soudain la porte du bungalow grinça, ce qui me ramena immédiatement à la réalité! Aldo jaillit sur le seuil et son apparition soulagea une grande partie du groupe...Michael n'avait même pas tourné la tête pour saluer son père!!

Le sourire aux lèvres, Aldo vint s'attabler à côté de Lincoln, qu'il gratifia au passage d'une tape affectueuse dans le dos. Tout comme pour nous, Sara déposa une tasse de café devant lui et s'assit de l'autre côté pour entendre ce qu'il avait à nous raconter!
Sucre toujours debout, sa tasse à la main jeta un coup d'oeil furtif par la fenêtre et s'adressa à Aldo:

« Vous comptez nous emmener faire une petite rando tous ensemble avec votre camionnette?? C'est vrai que ce Touran en jette bien plus que votre pauvre guimbarde, dans laquelle je n'aurai jamais voulu monter!!! »

Aldo éclata d'un rire franc et fit un clin d'oeil à Sara, qui souriait à la plaisanterie de Sucre!!

« Vous avez parfaitement raison Fernando, il est temps de bouger d'ici et d'aller prendre l'air...C'est pourquoi j'ai pensé qu'un véhicule de cette taille serait bien plus adapté à notre petit groupe!! Ramassez vos affaires, tout le monde vient sans exception, nous quittons Gila et le Nouveau Mexique dans une heure! »

Même si sa voix était amicale, le ton qu'il avait employé ne permettait aucun refus et chacun avait perçu l'urgence de la situation. Dociles, nous nous affairâmes en silence, tandis que Aldo se rendait à la réception du motel pour régler les nuits passées.

Lincoln se chargea d'entasser les quelques affaires dans le coffre et optimisa l'intérieur du Touran en dépliant les sièges arrières.
Le véhicule aux vitres fumées immatriculé d'une plaque diplomatique, bénéficiaient d'un large habitacle qui permettait à sept personnes adultes de prendre place aisément. Aldo n'avait vraiment négligé aucun détail!


(*)Je me retiens, mais cette situation me fait vraiment chier...Je ne crois pas que je vais rester ici plus longtemps, maintenant je vais aller arrêter cette connasse de Présidente... Bon Dieu, c'est pas une vie...je suis enfermé dans un putain de bungalow et...pfff!

♦♦♦♦♦♦

Notre départ se fit dans la précipitation et Aldo n'avait pas trouvé bon de nous dire où nous allions...Nous étions dans la confusion la plus totale et j'espérais pour ma part que cet homme avait un plan bien précis, pour nous embarquer ainsi tous les sept, sans nous donner de raisons!!

Installé au volant, il prit la direction d'Albuquerque et lorsqu'il estima que nous étions suffisamment loin de Gila, il nous exposa la situation:

« Cette nuit, j'ai pris des dispositions pour nous permettre de parvenir à notre but et j'ai eu gain de cause! Caroline Reynolds nous attend dans deux jours à Chicago, où elle doit participer à un meeting à l'occasion de l'investiture du nouveau Sénateur qui remplacera le père de Sara. Mon équipe a organisé une rencontre afin d'obtenir la grâce de Linc et de Michael, en échange des preuves que nous avons contre elle! Nous devons donc rentrer dans l'Illinois au plus vite, et nous ne devons pas manquer ce face à face!!

- Je suis ravie que vous éclairiez enfin nos lanternes!!! Je commençais à croire que vous nous emmeniez faire un pique-nique!!!

- Fernando, vous êtes vraiment impayable, et sur ces bonnes paroles, je vous propose de prendre le volant, car je n'ai pas dormis de la nuit et si nous voulons arriver à Chicago après demain, il est impératif que nous conduisions tous à tour de rôle!! »

Le voyage se déroula de la sorte, permettant aux uns de se reposer, alors que les autres se relayaient au volant. Nous traversâmes une partie du Texas, puis l'Oklahoma. Après plus de trente heures de conduite en continue, nous parvînmes dans l'Etat du Missouri.

Kellerman qui était au volant nous réveilla pour nous faire part d'un élément impromptue: la traversée du fleuve Missouri à la hauteur de Saint Louis était surveillée par des gardes frontières.



Sucre bailla et pesta contre le réveil un peu brutal:

« J'vous ai laissé dormir, moi!!!Je faisais un si beau rêve...Maricruz et moi on était en Lune de Miel, et ...

- C'est bon on a compris!!! Je vous ai réveillé parce que je pense que nous allons avoir de gros ennuis pour traverser ce pont reliant l'état du Missouri à celui de l'Illinois...Et nous sommes assez pressé par le temps, si je ne m'abuse!!! Je suis donc ouvert à vos propositions si vous en avez!! »

Kellerman avait l'air passablement agacé par le comportement enfantin de Sucre et pour une fois je ne lui donnais pas tord!! Ce barrage étrange des forces de l'ordre pouvait nous nuire et nous ne parviendrions jamais à atteindre notre but!
Il nous fallait une solution et vite!!

Aldo qui avait une idée derrière la tête se tourna vers moi:

« Amy avez-vous votre plaque du FBI sur vous? Elle nous sera bientôt très utile!! »

Puis s'adressant à Kellerman:

« Paul, munissez-vous de votre plaque des Services Secrets, et continuez à conduire jusqu'au barrage de Police! »

J'avais évidemment ma plaque avec moi! Elle ne représentait plus ce qu'elle avait été professionnellement pour moi, mais je ne pouvais m'en défaire, et je la conservais comme un précieux talisman, souvenir de ma vie passée!!!

Kellerman avait ralenti et s'engagea prudemment sur le pont. Il ne nous fallut que quelques minutes pour parvenir au barrage de Police. Sucre, Lincoln, Michael et Sara étaient livides à l'arrière du véhicule...Soudain, Aldo actionna un bouton caché à l'intérieur de la boîte à gants et une vitre fumée descendit entre l'avant et l'arrière du Touran. Je regardais le miracle se produire et je me fis la réflexion que je n'avais jamais vu ce système ailleurs que dans une limousine ou dans un véhicule de fonction...Cette sécurité pouvait bien nous sauver la vie!!!

Le Touran se stoppa enfin et nous entendîmes la discussion qui se déroulait à l'avant:

« Messieurs bonjour, Garde Frontière Nationale, je vais vous demandez de descendre du véhicule, de me montrer vos papiers et de m'indiquer la raison de votre voyage en Illinois?

- Agent Spécial Paul Kellerman!

- Agent Spécial Tom Knight, nous sommes en mission et nous accompagnons l'ambassadeur Salmeck, en poste à Hawaï. Il est attendu par la Présidente Reynolds à Chicago pour l'investiture du Sénateur Morton. Se sont de très vieux amis... »

J'entendis les portes avant claquer, Aldo et Kellerman venaient de mettre pieds à terre:

« Merci, je vais aller vérifier si ces papiers sont en règle. Pouvez-vous baisser la vitre de protection afin que je contrôle l'arrière du véhicule s'il vous plaît?

- L'Ambassadeur a fait un long voyage en voiture pour venir jusqu'à Chicago et il se repose. Ce diplomate a une sainte horreur des avions, c'est pourquoi nous l'accompagnons depuis Hawaï. Vous comprendrez donc, qu'à moins d'une raison significative, il ne souhaite pas être dérangé!! »

De longues minutes passèrent, et le silence se faisait pesant...A chaque bruit suspect, je m'attendais à voir les portes arrières du Touran s'ouvrirent et dévoiler aux yeux des autorités nationales notre subterfuge...!!

Enfin le Garde Frontière revint:

« Messieurs, tout est en ordre, pardonnez-moi de vous avoir retarder, mais nous sommes à la recherche de dangereux criminels, et nous avons pour mission de fouiller tous les véhicules sans exception...J'espère que je n'aurais pas réveiller l'Ambassadeur!! Je vous souhaite une bonne journée!! Vous pouvez circuler!»

Le Touran redémarra et reprit sa route. Il fallut encore de longues minutes avant que Aldo n'abaisse la vitre fumée qui nous séparait!

Michael avait l'air incrédule, et je vis dans ses yeux, pour la première fois, une once de considération pour son père:

« Comment savais-tu que nous serions arrêtés?? C'est dingue, je nous croyais perdus...Tu es vraiment plein de ressources!!!

- J'ai encore de nombreux contacts dans le milieu, et mon équipe s'est chargée de se renseigner sur les personnalités invitées pour ce meeting...Il s'avère que l'Ambassadeur est indisposé et ne pourra pas se rendre à Chicago, mais cela est encore tenu secret!!!Quand au barrage de Police, c'était une éventualité que je ne devais pas négliger...

- Tu aurais put nous faire prendre avec tes conneries...!!! »

Lincoln pour sa part avait du mal à avaler la pilule et suait dur à l'idée de retourner dans le couloir de la mort!!!

Le reste du voyage jusqu'à Chicago se déroula sans anicroche.

♦♦♦♦♦♦

Aldo nous conduisit jusqu'à l'extérieur de la petite ville de Crystal Lake, à une cinquantaine de kilomètres de Chicago.

Il nous expliqua qu'un petit avion commercial avait été mis à sa disposition quelques temps (un vieux contentieux avec l'un des ses contacts, qui lui était redevable!!) et qu'il se trouvait sur l'aéroport privé de Crystal Lake.

J'avais envisagé que nous puissions nous rendre à Chicago en avion, mais cela me paraissait de moins en moins probable et je ne comprenais pas bien pourquoi nous avions besoin d'un avion...

Encore une fois, je n'étais pas la seule à me poser cette question et ce fût Sara qui souleva le problème:

« Pardonnez-moi Aldo, mais nous sommes si près de Chicago, que je ne vois pas l'intérêt de nous y rendre en avion!!!

- Nous n'irons pas à Chicago en avion! A vrai dire, je n'y vais pas non plus... »

La stupéfaction générale se lut immédiatement sur tous nos visages et Aldo s'empressa de clarifier son propos:

« L'avion n'est qu'une sécurité de replis au cas ou...De plus, j'ai laissé quelques affaires dans la hangar de l'avion qui devraient vous servir à parvenir jusqu'à Caroline Reynolds...Quand à moi, je préfère rester à Crystal Lake et vous attendre, car "la Compagnie" me cherche toujours et pourrait me mettre la main dessus à l'occasion de ce meeting...et je ne le souhaite pas! D'autre part, si les choses tournaient mal, je suis le seul à savoir piloter un avion et nous pourrions quitter ce pays rapidement...Vous êtes suffisamment nombreux et efficaces pour vous confronter seuls à la Présidente et obtenir réparation... »

La logique de Aldo se tenait, et aux vues des incidents auxquels nous avions été confrontés jusqu'à maintenant, il était sans doute préférable d'avoir un plan de replis. Cette conclusion n'échappa à personne et nous ne revînmes plus sur la décision de Aldo.

Un hangar de bonnes dimensions se dressait sur le tarmac du petit aéroport privé de Crystal Lake et Aldo indiqua à Kellerman de s'y rendre directement.

La situation géographique du lieu était idéale, car il n'y avait aucune habitation à des kilomètres à la ronde...Nous étions seuls pour préparer notre plan d'attaque.

Je fus surprise de découvrir l'intérieur du hangar qui ressemblait à un vaste entrepôt de matériel: une partie du lieu abritait des planches sur traitaux reconverties en bureaux d'appoints, il y avait des ordinateurs, des fax, des téléphones cellulaires...Les bureaux étaient jonchés de papiers et de documents officiels. Mais cette partie du hangar n'était pas la plus surprenante!! Dans le fond de l'entrepôt, je venais de voir un amoncellement de vêtement en tout genre, des chaussures, des perruques, une table de maquillage...on se serait cru dans les loges d'un théâtre!!! Deux voitures étaient stationnées à côté des deux bureaux, et ce amas de matériaux cohabitait bizarrement...!!

Aldo nous expliqua que ce hangar lui servait depuis plusieurs semaines de planque et de lieu d'investigation sophistiquée...Même si le lieu ne payait pas de mine et que le matériel paraissait usé, il n'en était rien et le père de Lincoln et Michael travaillait avec les meilleures technologies actuelles. C'est grâce à ce matériel qu'il avait suivi à partir de ce hangar la fuite de ses deux fils depuis Fox River, et qu'il avait finalement mis la main sur eux à Gila!!!

Même si Aldo nous avait déjà fourni de nombreuses explications concernant sa vie et "la Compagnie", il continuait d'être un grand mystère pour moi, et comme le temps pressait, je n'eus pas loisir de lui poser plus de questions!!

Il nous fournit des costumes à chacun, et nous passâmes les nouveaux vêtements avec étonnement!
Pour ma part, je n'avais pas l'impression de me travestir, car ce costume ressemblait d'assez près à mes costumes professionnels et aux tenues que je portais quand j'étais en service...Sucre qui avait enfilé sa chemise de costume se débattait avec la cravate qui lui était assortie...Je vins aussitôt à sa rescousse et lui fis son noeud de cravate d'une main experte:

« J'ai jamais aimé ces machins, ça me rappelle l'enterrement de ma Yaya!! Si Maricruz me voyait, elle adorerait, car elle rêve de me voir en tenue de Gentleman...(puis se tournant vers Michael) Eh "papi", on dirait que tu as porté ça toute ta vie..."Que guapo"!!! »

L'heure n'était plus à la plaisanterie, et ces costumes sombres devaient nous permettre de passer les premiers barrages de sécurité du meeting pour atteindre la Présidente Reynolds.

Aldo qui était particulièrement minutieux nous avait fabriqué un ordre de mission officiel du FBI indiquant nos nouvelles identités (exceptée la mienne qui ne nécessitait pas d'être changée!!) et notre rôle de renfort aux équipes en place autour de la Présidente à l'occasion du meeting.

Une fois les garçons habillés, ils chaussèrent des lunettes noires et la transformation s'avéra bluffante, car il ne restait rien des trois fugitifs de Fox River!!!
Kellerman ainsi vêtue avait retrouvé son aura et sa prestance naturelle, les mêmes qui m'avaient frappé lorsque je l'avais rencontré la toute première fois dans le bureau d'Alexander Mahone!!

Enfin, Sara apparue, mais contrairement à nous elle ne portait pas un costume d'Agent Spécial. Aldo lui avait prêté des vêtements râpés et une perruque.
Ce déguisement lui faisait ressembler à une petite Dame respectable, de plus, un peu voûtée et s'accompagnant d'une canne, elle paraissait avoir pris trente ans en deux minutes!!
Sara sourit à sa vue dans le miroir de la table de maquillage, puis jeta un regard amusé sur les hommes du groupe qui comme elle venait de changer de personnalité!! Lincoln tirait maladroitement sur sa veste de costume et paraissait tendu à l'idée de devoir donner le change dans cette tenue...Je songeais qu'il n'avait pas dut porter de costume depuis très longtemps!!
Le plus à l'aise était sans doute Michael, il semblait avoir porté ce genre de vêtement toute sa vie, et je me rappelais que sa profession, Ingénieur en Génie Civil, l'avait certainement amené à s'habiller souvent ainsi! Je surpris même un clin d'oeil amusé entre Sara et Michael qui se jaugeaient réciproquement!!!

Aldo nous fit un rapide briefing de la marche à suivre et remit à Sara le DVD, ainsi que le petit carnet noir. Nous nous débarrassâmes de nos armes et Aldo nous en remis de nouvelles, limées et sans numéros de série...Sucre regardait la sienne avec dégoût, tandis que Michael et Lincoln rangeaient la leur dans une poche ou à l'arrière de leur pantalon. Kellerman fut le seul qui ne reçut rien!!!
Je rangeait la mienne dans le holster de mon ancienne arme et glissa ma plaque dans la poche intérieure de ma nouvelle veste.
J'étais chargée de présenter l'ordre de mission et de conduire l'équipe à bon port!!!
La séparation entre les membres de notre groupe et Aldo fut rapide, et je pris place au volant du Touran, Kellerman à mon côté, Sucre, Sara, Michael et Lincoln à l'arrière du véhicule...

La cinquantaine de kilomètres séparant Crystal Lake de Chicago se fit sans encombre, mais les abords de la capitale furent plus compliqués...La circulation était dense, et l'événement politique de la fin de journée, semblait créer des émules!!
Il nous fallut plus de deux heures pour atteindre l'intérieur de Chicago et nous rendre au QG officiel du meeting...Caroline Reynolds, fidèle à elle-même et à son désir de toujours se mettre en avant, avait fait organiser une conférence au pied de la NBC Tower de Chicago, centre névralgique de l'information télévisuelle d'où elle pourrait s'adresser à la Nation entière et d'où elle investirait de ses nouvelles fonctions, Liland Morton, futur Sénateur de l'Illinois.
Les loges de l'événement se trouvait à un bloc de la NBC Tower, à l'Hôtel Sheraton et c'est dans ces murs que nous devions rencontrer pour la seconde fois la Présidente des Etats Unis.

Nous déposâmes Sara à quelques rues du meeting. Son rôle était de nous servir de relais et de rester en possession des preuves jusqu'à ce que la Présidente se soit acquittée de sa tâche envers Lincoln. Pour cela, nous resterions en contact par téléphone avec elle, et grâce à son déguisement elle serait en mesure de se fondre dans la foule sans se faire remarquer!!!

Les premiers barrages de sécurité établis en périphérie de la NBC Tower furent relativement facile à passer, et je n'eus qu'à dégainer ma plaque du FBI pour me voir ouvrir toutes les portes nécessaires...Je me serais cru revenue au bon vieux temps!!!
Plus nous passions les blocs nous rapprochant de l'Hôtel Sheraton, plus la sécurité s'intensifiait et plus il était dangereux de nous voir démasquer! Mais l'ordre de mission de Aldo semblait parfaitement officiel et nous parvînmes enfin au dernier barrage avant de pénétrer sur le parking de l'Hôtel.
Les hommes de la Présidente (nous avions affaire à son service rapproché, et non pas à des Agents de Police classiques comme aux autres barrages!) étaient méfiants et il me fallut force de persuasion pour les décider à nous laisser entrer et surtout prévenir Caroline Reynolds de notre présence, afin que la rencontre ait lieu...Après une longue discussion, je garais enfin le Touran dans un coin du parking de l'Hôtel destinés aux fournisseurs. L'endroit était reculé et bénéficiait d'une rampe d'accès reliée à l'un des périphériques de la ville ce qui nous permettrait de nous retirer rapidement si cela était nécessaire!!!
Sucre fut désigné pour garder le véhicule en marche et guetter les environs, et une fois de plus nous lui confiâmes Kellerman, qui ne pouvait de toute façon pas venir avec nous!!!
Les deux hommes prirent place côte à côte à l'avant du Touran, alors que Michael, Lincoln et moi traversâmes le parking pour entrer dans l'Hôtel Sheraton par une porte dérobée destinée à l'équipe de maintenance...

L'Hôtel était désert, et je supposais à juste titre qu'il avait été vidé pour l'occasion exceptionnelle et qu'avec un peu de chance nous n'aurions pas à croiser grand monde hormis les hommes de sécurité de la Présidente...Ils pouvaient bien nous reconnaître, maintenant nous étions en mesure de parlementer et personne n'aurait l'ascendant sur nous!!!

La Présidente avait fait savoir à Aldo que la confrontation se ferait dans la suite 215 de l'Hôtel, au deuxième étage, et que nous devrions nous y rendre et l'y attendre...Ce que nous fîmes!!

La porte était fermée, mais la suite n'était pas close et nous pénétrâmes ensemble dans ce lieu de face à face pour le moins folklorique...
Lincoln desserra le noeud de sa cravate et s'affala dans l'un des fauteuils du petit salon, quand à Michael il ne semblait pas tranquille:

« Amy, je trouve que les choses se sont trop bien déroulées jusqu'à présent...Je ne crois pas à la chance et je sens au fond de moi que quelque chose va se passer...Toute cette mascarade est bien trop lisse, ce n'est pas normal!!!

- Michael, je ne sais pas quoi te dire...J'attends de revoir Caroline pour régler toute cette histoire, mais il est vrai que nous sommes parvenu à cet hôtel un peu facilement...Soit ton père est vraiment très doué pour falsifier les papiers et possède un pouvoir illimité pour faire tomber la Présidente, soit c'est elle qui nous mène en bateau...Et j'aimerai plutôt parier sur ton père cette fois!!! »

Michael me donnait des sueurs froides à douter ainsi, et je commençais à penser que tout cela risquait de tourner vraiment mal pour nous si n'arrivions pas à être suffisamment persuasifs avec la Présidente Reynolds...

Soudain la porte de la suite s'ouvrit et je restais perplexe devant la personne qui entra!!!
Je ne l'avais pas revue depuis Kenosha, j'avais même occulté de ma mémoire cette partie de l'aventure!!! "L'asiatique" qui m'avait rompu les doigts fit irruption dans le salon de la suite de l'Hôtel Sheraton...
Lincoln s'était levé d'un bond et regardait cet homme qu'il ne connaissait pas, avec de grands yeux...
Il faut dire que celui-ci arborait un visage pour le moins "marqué"!!! La lèvre inférieure tuméfiée, l'arrête nasale de travers et des poches bleues qui soulignaient ses yeux bridés, il avait l'air d'un boxeur qui avait pris la raclée du siècle!!!
Mais tout comme la première fois que je l'avais rencontré, il n'avait rien perdu de son air hautain et il se dirigea vers nous d'un pas décidé:

« Monsieur Scofield, Monsieur Burrows, Agent Lawrence, la Présidente qui est particulièrement occupée me charge de venir récupérer les éléments que vous possédez...Finissons-en, je n'ai pas toute la journée!!! »

Lincoln les yeux écarquillés fixait ce petit homme arrogant. Il s'avança à sa hauteur et le toisa de sa stature imposante:

« On peut savoir qui vous êtes?? On devait rencontrer la Présidente, pas un de ses sous fifres, faites-lui donc savoir qu'on va patienter jusqu'à ce qu'elle veuille bien nous rencontrer!!

- Je m'appelle Kim, je suis le Conseiller Particulier de la Présidente, Monsieur Burrows. Je vois que votre petite camarade ne vous a pas parlé de moi!!
Je suis vexé, vraiment, après le charmant moment que nous avons passé dans la forêt tous les trois!!! Mais où est donc votre charmante amie, Mademoiselle Tancrédi??? »

Lincoln et Michael se tournèrent vers moi pour avoir confirmation des dires de Kim, je haussais les épaules comme unique réponse...Michael qui venait de comprendre que l'état du visage de Kim était dût à notre intervention musclée à Sara et à moi, me gratifia d'un clin d'oeil plein de malice, et d'un petit sourire en coin...
Puis il se tourna vers Kim et fût on ne peut plus clair à son égard:

« Faites savoir à la Présidente que les termes de notre accord étaient définis et que si elle ne respecte pas ces termes, elle risque très gros...Son frère en est l'enjeu, cela devrait lui donner l'envie de venir récupérer les éléments de l'échange elle-même!! Nous allons rester ici, pendant que vous transmettez le message, Monsieur Kim...et merci pour votre aide!!! »

Je n'avais jamais vu Michael aussi maître de la situation et d'un coup toutes nos appréhensions venaient de retomber...Nous menions le jeu et la Présidente devrait s'aligner ou plier définitivement!!!!

Kim tourna les talons et sortit de la suite en faisant profil bas...

Quelques minutes passèrent et la porte de la suite se réouvrit une nouvelle fois. La Présidente Reynolds franchit le seuil la première, suivie de près par Kim son Conseiller très particulier!!!

Visiblement énervée de devoir régler cette affaire elle-même, elle ne nous salua pas et se tourna vers Kim qu'elle congédia d'un geste d'agacement. Le petit homme en costume trop bien coupé, protesta vivement, puis se ravisa devant la mine déterminée de la Présidente, ses décisions ne souffraient jamais de contradiction!! Enfin il se retira, nous laissant seuls avec Caroline Reynolds pour notre ultime confrontation:

« Finissons-en, le Sénateur Morton m'attend et j'ai encore une partie de mon discours à revoir!!

- Vous n'êtes plus en position de négocier, Caroline!! Et cette fois, c'est vous qui allez honorer votre part du contrat!! L'échange est simple, comme vous le savez, nous sommes en possession d'un film montrant votre frère, Terrence Steadman en vie, et cela bien après sa mort présumée...Ainsi, si vous voulez récupérer ce DVD, vous allez devoir accorder votre grâce présidentielle à Lincoln Burrows et à Michael Scofield, aux yeux de la Nation...Cette déclaration doit être immédiate!!! Je vous laisse le choix des arguments, vous avez un véritable talent pour raconter des histoires!!!! »

Je voyais la Présidente bouillir de rage à l'écoute de ma demande et je m'attendais à ce qu'elle me saute à la gorge pour une telle insolence!!!
Elle ne fit rien, et lorsqu'elle eut parfaitement assimilée les termes, son visage redevint impassible:

« Un film...Il est évident que cette preuve est un bien piètre moyen de pression, et vous le savez tout comme moi...Si vous pensez que je vais céder contre cela, vous vous trompez lourdement...Ainsi, si vous n'avez plus rien à me dire, je vais regagner ma chambre et finir mon discours...Et je vous conseille de prendre les escaliers et de vous sauver vite fait avant que mon service d'ordre, le vrai, se charge de vous!!! »

Sans plus un mot, elle se dirigea vers la porte et alors qu'elle s'apprêtait à quitter la suite définitivement, Michael s'adressa à elle:

« Je me doutais que ce film n'ét ait pas un argument de poids pour vous, c'est pourquoi, mon père, Aldo Burrows vous fait savoir que Terrence est aux mains de ses hommes en ce moment-même et que si vous ne tenez pas parole, la sentence sera irrévocable...Cette fois, la famille Burrows aura réellement le sang de Steadman sur les mains!!!! Suis-je assez clair?? »
La Présidente se retourna et regarda Michael d'un air effrayé...Je la voyais vulnérable pour la première fois et cette visions pathétique de la première femme des Etats Unis était particulièrement déconcertante...
Michael et Aldo semblaient s'être concertés dans notre dos, car ils n'avaient rien dit concernant cette partie du chantage, et j'espérais qu'ils avaient su faire la paix autours de la cause de Lincoln...

La Présidente fit venir l'un de ses hommes:

« Hale, téléphonez à la maison de Blackfoot et passez-moi Terrence!! Vite!! »

L'homme sortit et revient avec un téléphone mobile qu'il tendit à sa patronne:

« Terrence, Dieu du Ciel, tu n'as rien...
Oui, je suis déjà au courant...
Pour les hommes, ne t'inquiètes de rien, je ferais prévenir leurs familles!!!
Ne tentes rien, je vais tout arranger...Oui, moi aussi je t'aime! »

Et elle raccrocha! Puis se tournant vers Michael:

« Autant régler cette histoire entièrement, dites-moi où est le film, j'enverrai quelqu'un le récupérer et vous serez libres...Ne faites rien à Terrence!! Maintenant je dois me retirer car j'ai une nouvelle partie à ajouter à mon discours... »

Et elle quitta définitivement la pièce...Kim et deux de ses hommes vinrent prendre les dispositions pour récupérer le DVD, et le message fut transmis à Sara, qui nous fit savoir que le film avait été déposé dans une consigne de la gare routière de Chicago...

Puis, Kim s'installa dans le grand sofa qui faisait face à la télévision dernier cri qui masquait l'un des murs de la suite et l'alluma!
Le meeting était retransmis en direct par NBC et diffusé dans toute la Nation.

Lincoln suait à grosses gouttes, tandis que Michael et moi arpentions le petit salon d'un bout à l'autre...La tension était à son comble, et le dénouement de cette affaire était au bout de cette allocution...

Enfin, Caroline Reynolds apparut sur l'estrade dressée pour l'occasion, ovationnée par ses partisans et acclamée par les citoyens de Chicago venus en masse pour l'événement...

Elle débuta son discours par les banalités d'usage et venta allègrement les qualités humaines et politiques de Liland Morton...A ma droite, je voyais Lincoln se ronger les ongles nerveusement!!

Puis Caroline encensa la bonne vieille ville de Chicago:

« Si accueillante, si patriotique et si culturelle!!! »

J'avais comme la vague impression qu'elle retardait au maximum le moment de ses révélations et cela commençait à me troubler terriblement...Mais soudain, elle débuta une sorte de litanie dédiée à l'honnêteté et à la transparence, à l'importance de la famille et des amis, et au bonheur de se savoir soutenue dans les pires circonstances...Enfin elle aborda le décès de son frère par un hommage poignant...Cette fois on y était, nous touchions au but...:

« Mon frère était un homme remarquable et son action reste encore vive dans les mémoires, c'est pourquoi je souhaite ce soir et devant vous tous, faire preuve de grande compassion envers l'homme responsable de sa mort, Lincoln Burrows. Si Terrence était encore parmi nous, il aurait aimé que...(...) »

Sa phrase resta suspendue dans les airs, comme un écho...Un sifflement sinistre venait de retentir sur la place au pied de la NBC Tower, suivis d'un second, puis d'un troisième...Caroline Reynolds, le crâne éclatée par les balles, s'effondra les bras en croix aux yeux de la Nation entière, morte!

Les secondes qui suivirent furent plus longues qu'une éternité...Le pire venait de se produire et personne, pas même les médias ne semblaient réaliser l'ampleur de la situation...La Présidente des Etats Unis venait d'être assassinée et notre dernier espoir venait de s'envoler avec elle!!!!

Soudain, la foule prit peur et une cohue indescriptible se produisit dans les rues de Chicago et aux alentours de la Place où s'était déroulé le discours...Les gens couraient, se heurtaient les uns aux autres, et le service de sécurité ne savait où donner de la tête...Les images de l'écran si petites renvoyaient à peine la panique qui devait avoir lieu en bas...La voix affolée du présentateur de la NBC couvrait les cris et les plaintes de la foule, la Présidente venait d'être évacuée et conduite à l'Hôpital Santa Teresa de Chicago...

Incrédule, je fixais l'écran plasma et les images folles qui s'y reflétaient...quand tout disparu!! Kim, la télécommande à la main venait de mettre fin à cette foire en direct!!
Un sourire étrange affiché sur le visage, il continuait de contempler l'écran redevenu sombre...Le choc sans aucun doute, il était le conseiller particulier de Caroline Reynolds après tout...:

« Voilà une bonne chose de faite! Maintenant, finissons-en!! »

Kim s'étira paresseusement comme un chat et rajusta sa veste de costume avant de se lever du sofa dans lequel il était installé...Son attitude désinvolte tranchait avec l'agonie et l'angoisse qui régnait dans la suite...

C'est alors que je compris enfin! A cet instant, je touchais du doigt l'étendue des rouages de cette machiavélique conspiration et dans lesquels j'avais été prise à mon insu...
Ce petit homme arrogant et dénué de conscience faisait partie de la Compagnie et était lié de près ou de loin à l'assassinat de Caroline Reynolds...

Nous ne sortirions pas vivants de cette chambre d'hôtel!!!

Ma stupéfaction avait été telle, face à cet événement, que j'en avais presque oublié mes collègues de galère...
Lincoln affalé dans un coin de la pièce, avait les yeux dans le vide et le visage blême...Jamais je ne l'avais vu dans un tel état...Il savait que pour lui c'était la dernière chance et que son passeport pour la liberté venait de s'envoler avec la mort de Caroline...Les mains posées à même le sol, les jambes étirées devant lui, il ne semblait plus ancré à la réalité et je me demandais si je parviendrais à faire quelque chose pour lui...Il avait déjà tant souffert!!!
Michael était tombé sur une chaise, les deux mains en coupe accueillants sa tête... Tout comme son frère, il venait de renoncer, peu lui importait le prix que coûterait toute cette folie! Terrassé, le corps secoué de spasmes nerveux, il subissait les déferlements de toutes les pressions accumulées...

Deux hommes de la sécurité entrèrent dans la suite et Kim leur donna leurs nouveaux ordres:

« En attendant l'arrivée du Vice Président McCallum, vous prendrez vos ordres auprès de moi, faites-le savoir à toute l'équipe!!! Emmenez-moi ces deux-là au sous-sol, je m'occuperais d'eux plus tard... Avant, j'ai encore une affaire à régler!! »

Armes à la main, les deux hommes vêtues de noir, sommèrent Michael et Lincoln de les suivre. Les deux frères, assommés par l'enchaînement des événements, se laissèrent entraîner hors de la suite docilement...Michael me jeta un dernier regard accablé avant de quitter la pièce, puis ils disparurent dans un claquement de porte!!

En quelques minutes à peine, la sentence était tombée, la chance avait tourné, il ne nous restait plus rien!!!
A mon tour, je m'affaissais dans la chaise la plus proche et fixais la porte de la suite, dans l'espoir de la voir se rouvrir et me rendre les deux amis sur lesquels j'avais pu compter et qui m'avaient abandonné!!

Kim se pencha au dessus de moi et me pointa son arme de service sous le nez...Agitant l'objet métallique à quelques centimètres de mon visage il me signifia de vider mes poches et de me débarrasser de mes effets personnels sur la table...Ce que je fis avec lassitude...Je déposais tour à tour ma carte d'Agent du FBI, ma propre arme, mon holster et la carte de Chicago que j'avais conservé dans l'une de mes poches...

Kim éloigna le tout de moi, d'un revers de la main et s'assit sur le siège qui me faisait face:

« Je vous ai offert deux opportunités et vous n'avez pas su les saisir...Je suis au regret de vous annoncer que celle-ci sera la dernière et que cette fois vous n'avez plus le choix de me refuser ce que je souhaite récupérer depuis longtemps...Dites-moi où est le "petit carnet noir"? »

Je songeais un peu tard que cet homme était venu réclamer son due jusque sur les terres de mon père et qu'il n'avait pas eu gain de cause, puis qu'il s'était interposé entre la Présidente et nous et que encore une fois il n'avait pas obtenu satisfaction! Mais maintenant il était le dernier joueur et je n'avais plus de carte en main...

« Vous ne répondez pas? Peut-être estimez-vous que ce que je vous demande n'est pas digne d'intérêt!!

- Je ne l'ai pas!

- Sur vous, certes...Mais vous savez qui l'a et vous pouvez aisément le faire venir jusqu'à moi...!! »

Je regardais cet homme avec détachement et me dis qu'il ne pouvait plus rien pour nous de toutes façon...Je n'étais donc pas prête à brader notre ultime preuve, et j'espérais que Sara, Aldo ou Sucre parviendraient à nous faire justice si nous ne nous en sortions pas...

Kim éprouvait visiblement de la difficulté à rester assis et après avoir jeté la totalité de mes affaires dans la poubelle du petit salon, il se leva et se mit à arpenter la pièce d'un air songeur...:

« Je comprend que vous ne saisissiez pas l'enjeu de toute cette affaire...les Agents du Gouvernement sont si peu avertis de nos jours...Mais ce carnet est d'une importance primordiale pour les gens qui m'ont embauché...C'est pourquoi, et je ne vous le demanderai pas une seconde fois, dites-moi où se trouve le petit carnet noir?? »

Son attitude hautaine et déterminée tranchait avec sa fragilité physique et je reconnaissais que cet homme paraissait bien plus dangereux que Kellerman, Mahone ou T-Bag réunis...Il avait ce quelque chose de totalement obscur qui le rendait quasiment intouchable...Et même si nous avions réussis à l'atteindre une fois avec Sara, il semblait considérer cette erreur de parcours comme une expérience enrichissante...Je pouvais le lire dans son regard noir!!!

D'un geste désinvolte il faisait tourner l'arme entre ses doigts et semblait absorbé par ses réflexions...:

« (en aparté) Bien sûr tout ça est un peu rapide...mais IL avait raison et nous allons enfin clore cette affaire!!! »

Un instant je pensais qu'il m'avait oublié et me levais rapidement pour tenter quelque chose...:

« Ne me faussez pas compagnie, je n'en ai pas terminé avec vous!!! Asseyez-vous immédiatement! »

L'ordre était sans équivoque et son air détendu avait complètement disparu, laissant place à un visage fermé et totalement fou!!!

« Vous ne m'en voudrez pas j'en suis sûr, mais j'ai d'autres détails à régler avant de boucler cette journée mouvementée, je souhaiterez donc qu'on en finisse une bonne fois pour toute!! Rendez-moi mon carnet, et je vous rend vos otages!! »
Ma surprise fut telle que je retombais instantanément sur mon siège et encaissais le chantage...Voilà pourquoi il m'avait fait resté...j'étais la seule à posséder encore des pièces dans cette histoire et je ne pourrais pas me dérober!!

« Ne me regardez pas ainsi!!! Croyez-vous vraiment que Kellerman soit une personne de confiance??Incompétente je dirais!!! Se laisser suivre aussi simplement et croire que deux otages peuvent être le prix d'un chantage ou d'une pseudo liberté!!! Quoi que, il n'avait pas foncièrement tord!! »

Sa propre blague le fit sourire, puis franchement rire...Je saisissais alors que Kellerman s'était fait doublé et que Kim détenait ma sœur et Cameron Mahone!!

« Rendez-les moi et je vous livre le petit carnet...Vous avez ma parole!!!

- Voilà qui est déjà plus raisonnable...Mais nous allons procéder dans cet ordre : le carnet noir, ici, avant 18h et je vous fait savoir où les otages ont été transférés...! »

Je jetai un œil à ma montre, il était 16h30...

Je savais d'instinct que le marché était tronqué, mais je n'avais pas le choix, et je voulais croire que nous trouverions un terrain d'entente et que je reverrais ma sœur bientôt et ramènerai le petit Cam à mon ancien collègue...

Docilement je signifiais à Kim que j'acceptais toutes les conditions de notre pacte et lui demandais de me fournir un téléphone afin de prendre contact avec Sara qui avait le carnet en charge. Kim me proposa la ligne de la suite, mais je refusais catégoriquement, ce téléphone pouvait être pisté et je ne souhaitais pas voir Sara tomber dans un guet-apens...!!
Les yeux toujours rivés sur ma montre je regardais les minutes s'égrener...Le temps n'était pas mon allié et j'aurais aimé le figer pour parvenir à mes fins!!
Kim se servit de la ligne de la suite pour qu'on lui apporte un téléphone mobile dans les plus brefs délais...
Quelques minutes suffirent et l'un des deux hommes en noir qui avait emmené Michael et Lincoln avec eux, apparut dans le petit salon, un petit boîtier à la main.
Instantanément je reconnus l'appareil de Michael, il était le seul d'entre nous à être relié avec Sara et Aldo et il n'aurait donné ce privilège à personne, même sous la contrainte...Voir le mobile dans la main de cet homme était un mauvais, très mauvais signe!!!
L'homme en costume noir déposa le téléphone de Michael face à moi et se retira aussitôt...

Kim avait pris place dans l'un des fauteuils de la suite, et semblait profiter de son nouveau pouvoir. Le visage de nouveau serein, il affichait un petit sourire complaisant et croisa les jambes et les bras tout en me fixant du regard: la balle était maintenant dans mon camps!!

Je pianotais le numéro de Sara à deux reprises, l'importance de l'enjeu et l'approche du délai impartie me faisait perdre mon sang froid...Enfin, j'obtins une tonalité, le mobile semblait sonner dans le vide...mais après cinq sonneries j'entendis la voix de Sara au loin:

« Allo??

- Sara, tu m'entends?? C'est Amy!!!

- ...

- Sara, tu es là? C'est important!!!

- ... »

J'entendais des gens crier à l'arrière. Les bruits de fond de la rue étaient tels que je ne parvenais pas à établir le contact audio avec Sara...
Enfin les sons qui parasitaient notre conversation diminuèrent, jusqu'à n'être plus que de vagues résonances lointaines:

« Amy? Amy c'est toi???Je n'entendais rien, les gens sont devenus fous dans la rue...Tout le monde court dans tous les sens...Je viens de rentrer dans un magasin et je suis cachée dans une des cabines d'essayage, au moins ici je pourrais t'entendre!! Tu es toujours là??

- Oui Sara, je suis là!

- Mais qu'est-ce qui se passe à la fin, je n'ai pas put approcher de la place où se trouve la NBC Tower, et d'ici nous n'avons pas de retransmission du discours de la Présidente...Alors, vous avez réussis??? »

Je n'avais pas le cœur à lui annoncer les catastrophes qui s'étaient accumulées depuis que la Présidente avait mis la main sur le DVD, mais elle devait savoir ce qu'il en était, et à quel point j'avais besoin de son intervention rapide:

« Sara, la Présidente Reynolds vient d'être assassinée en direct, je dois récupérer le petit carnet noir au plus vite, il est notre dernier espoir!!!

- Quoi?!!!! Non je ne peux pas le croire...Oh mon Dieu!! Amy comment vont Michael et Lincoln?? Passes-les moi s'il te plaît!

- Sara, je n'ai pas le temps, est-ce que tu as toujours avec toi le petit carnet noir??

- Oui bien sûr!!

- Écoute-moi bien, tu vas le remettre à un coursier au plus vite et tu le fais envoyer à l'Hôtel Sheraton, dans la suite 215, au deuxième étage, pour passer les barrages de sécurité il devra dire que le paquet est pour Monsieur Kim!

- Monsieur Kim??

- Sara, je n'ai pas le temps de t'expliquer la situation, mais je te conjure de me faire confiance, le petit carnet noir doit être ici à l'Hôtel avant 18h, tu as bien compris?? 18h au plus tard!!

- Je m'en charge, et je vous retrouve à l'endroit prévu après!!

- C'est ça, oui...Merci Sara! »

Et je raccrochais avec désespoir! Kim qui ne m'avait pas quitter des yeux, continuait de sourire effrontément!! Après avoir déposé le téléphone aussi loin de moi que possible, comme s'il était la source de tous mes malheurs, je tombais la tête entre mes deux mains comme l'avait fait Michael voilà quelques minutes, et poussais un soupir de lassitude...

Les minutes qui suivirent furent un calvaire pour moi, je revoyais continuellement l'instant où notre destin avait définitivement basculé, le moment où Caroline Reynolds avait suspendue son discours et avait embrassé sa mort de la pire forme qui soit, de deux balles dans la tête...

17h...17h15...17h30...A 17h45, je renonçais et envisageais le pire...!!

Kim qui n'avait pas quitté le confortable fauteuil dans lequel il avait pris place, commençait à trouver le temps long!! Martelant le sol nerveusement de son pied droit, il était à nouveau en proie à ses folies intérieures, et son visage fermé ne laissait plus transparaitre le moindre sourire de satisfaction...

Le silence dramatique qui régnait dans la suite tranchait sans doute assez violemment avec la panique qui devait persister à l'extérieur...! C'est pourquoi je sursautais, quand Kim se leva d'un bond:
« Cette fois il est trop tard...Ma patience a des limites, et je ne supporterais pas d'attendre plus longtemps...Finissons-en!! »

D'un pas, il s'avança vers moi, l'arme tendue, le visage décidé...

Il était hors de question que je finisse abattue de deux balles dans la tête comme Caroline Reynolds...
D'un air de défi je me relevais lentement et faisais face à mon bourreau, il m'abattrait les yeux dans les yeux, et mon regard le hanterait jusqu'à ce qu'il rejoigne l'enfer à son tour...Digne, j'affronterais ma mort si cela pouvait sauver les vies de toutes les personnes impliquées dans cette terrible affaire...!!
Maintenant j'étais prête!!

Soudain, un coup retenti à la porte, suivi d'un second moins timide, puis d'un troisième...Il était 17h58...!!

Un jeune homme portant la casquette jaune et rouge du parfait coursier pénétra dans la suite, d'un pas mal assuré et se figea quand il surprit la scène qui était en train de se dérouler sous ses yeux!!!

D'un geste rapide, Kim rengaina son arme et se précipita à la rencontre du jeune employé, pour lui arracher le petit colis des mains!!
Tout en congédiant le jeune homme avec rudesse, il se mit à déchirer le papier kraft entourant le petit carnet noir...

Lorsque le coursier fût partie, Kim était en possession de notre dernière preuve, du dernier maillon nous permettant de faire tomber "La Compagnie"...De notre dernière chance d'être de nouveau libres!!!

Satisfait, il déposa le "Trésor" sur la table basse du salon et passa un ultime coup de téléphone:

« Ici Kim, je suis en possession du carnet...

- ...

- Oui Général, il ne restera rien d'eux...

- ...

- Non, je me suis débarrassé des otages, vous ne risquez plus rien!!

- ...
- A cette heure-ci, Scofield et Burrows doivent être morts...

- ...

- Bien sûr Général, je me charge de vérifier...et je vous ramène les corps!!!

- ...

- Non, il me reste un dernier détail à régler!!! Je retourne au QG juste après!!!

- ...

- A vos ordres!!! »

Et il raccrocha...

Ce que je venais d'entendre dépassait à tous points de vue mon entendement...Mon corps et tous mes membres venaient de recevoir comme un sceau d'eau glacée... Je fus saisie de tremblements violents!!
Accablée, je ne pouvais décrocher mon attention de ses lèvres et de ce qu'il venait de dire à son interlocuteur:

« Je me suis débarrassé des otages!!! »

Cameron et Beth avaient été les victimes de cette machination...Ce type avait eu leur peau, bien avant ce chantage...Il devait mourir et rien ne pourrait le sauver!!
Mon corps entier hurla ma peine et je lui crachais au visage:

« Tu les as tué!! Salaud...J'aurais ta peau...Sur sa tombe je le jure, je te saignerai fumier!!!! »

Dans un excès de rage je me précipitais sur Kim, qui n'eut même pas le temps de dégainer son arme...

Une lutte au corps à corps s'engagea alors...
Griffant, mordant, frappant, je n'étais plus que douleur et chagrin...Chaque geste, chaque violence distribués n'étaient que les complaintes de mes deuils...
Il venait de me retirer tout ce qui comptait pour moi...la dernière parcelle de ma famille envolée...et le petit garçon innocent, d'un Agent blessé!!!

Dans un ultime effort, habitée par la folie, j'arrachais un pan de sa veste et son arme, cachée au fond de sa poche intérieure tomba sur le sol...
Aveuglée par la haine je me jetais sur la moquette pour m'en saisir, mais Kim fût plus rapide et sa main vint recouvrir la mienne alors que je m'emparais du Smith & Wesson...
Bataillant fermement, je plantais mes ongles dans sa chaire pour lui faire lâcher prise, quand soudain, des échos de tirs résonnèrent à l'extérieur de la suite...!!!

Une demi seconde suffit à changer la donne pour toujours...Le chaos qui se mit à régner à l'extérieur attira l'attention de Kim qui se détournait un « simple » instant de sa cible...

Je me saisie définitivement de l'arme et la retournais contre son propriétaire...
Une balle partie, atteignant Kim à la cuisse, suivie d'une seconde qui lui pulvérisa la main gauche...

L'« Asiatique » tomba sur le sol, en hurlant de douleur...Mais ça n'était pas assez...Jamais cela ne remplacerait ce qu'il venait de me prendre...Jamais, plus jamais je ne serais la même!!!

Me relevant lentement, indifférente, je le regardais agoniser, la cuisse en sang et un bout de moignon où étaient encore suspendus quelques tendons, en guise de main gauche...!!

La tête froide...Vidée de toute conscience, habitée par la vengeance, l'instinct animal en éveil, je renonçais pour toujours à ce que j'avais été..

Je levais l'arme, doucement, comme un prolongement de ma souffrance et la pointais dans sa direction...

Au prix d'un ultime effort, je le vis implorer pour sa survie!! Quelle ironie!! J'étais devenu le bourreau, et même dans cette position, je savais que je ne pourrais jamais apaiser mon âme!!!

Dans le couloir, les tirs se rapprochèrent...Il fallait en finir maintenant ou jamais...

Avec une infinie précision, j'achevais mon « œuvre » et sans sommation, je lui logeais une balle entre les deux yeux!!!

Un regard d'horreur fixé sur moi, il mourut instantanément les yeux ouverts, la bouche déformée par la douleur...

Lâchant l'arme maudite, je m'écroulais sur le sol, submergée par une crise de nerf, pleurant comme une enfant...Alors que la porte de la suite venait d'être fracassée de l'extérieur...